Les chiens mordeurs représentent un défi majeur pour les propriétaires et les professionnels du comportement animal. Comprendre les raisons derrière ce comportement est essentiel pour prévenir les incidents et garantir la sécurité de tous. Les morsures peuvent être le résultat de divers facteurs, allant de l’anxiété et de la peur à des problèmes de socialisation et de hiérarchie. Cet article explore les causes profondes des morsures chez les chiens, les signes avant-coureurs à surveiller, et les stratégies pour gérer et corriger ce comportement problématique. En adoptant une approche informée et proactive, il est possible de réduire les risques de morsures et de favoriser une cohabitation harmonieuse entre les chiens et les humains.
Qu’est ce qu’une morsure dans le comportement canin ?
Selon le dictionnaire Larousse, une morsure est une « plaie causée par les dents d’un animal », impliquant une effraction cutanée. Dehasse J. (2002) définit l’agression comme un comportement visant à porter atteinte à l’intégrité physique ou à la liberté d’un autre individu. Ainsi, les signaux d’avertissement comme les grognements ou le retroussement des babines sont des agressions à prendre au sérieux.
Le comportement d’agression chez le chien répond à des stimuli et varie selon la génétique, l’environnement et l’éducation. Les agressions suivent une séquence :
- Phase d’avertissement : signaux auditifs (grognements) et visuels (posture, pilo-érection).
- Phase consommatoire : l’attaque, avec morsure plus ou moins contrôlée.
- Phase d’apaisement : léchage, fuite, retour à l’équilibre.
Les agressions peuvent être classées en :
- Compétition pour les ressources : accaparement de nourriture ou d’espace.
- Territoriale et maternelle : protection de l’espace ou des petits.
- Irritation : réaction à un stimulus énervant.
- Peur : absence de phase d’intimidation, morsures multiples.
- Prédation : agression envers des cibles perçues comme des proies.
Les morsures peuvent devenir instrumentalisées, c’est-à-dire que le chien simplifie la séquence d’agression en passant directement à la morsure, rendant le comportement moins prévisible et plus intense. La prédation et l’agression ne doivent pas être confondues, car la prédation vise à tuer une ressource, tandis que l’agression vise à mettre un protagoniste à distance.
Pourquoi le chien a-t-il mordu ?
Statistiques sur les chiens mordeurs
La moyenne d’âge des chiens mordeurs varie selon les études. Chomel B. (20) a constaté que la majorité des chiens mordeurs étaient jeunes (moins de 15 mois), tandis que Ricard C. a observé que 68 % étaient des chiens adultes (15 mois à 7 ans). Une autre étude révèle que 94 % des chiens mordeurs avaient entre 1 et 5 ans. La durée de vie des chiens varie selon la race, influençant les données sur les morsures. Les morsures graves sont souvent causées par des chiens de grande taille, dont l’espérance de vie est plus courte. De nombreux chiens mordeurs sont euthanasiés (34 %) ou éloignés des enfants (19 %).
Les mâles mordent plus souvent que les femelles (74 % des morsures selon une enquête de 2010), même si seulement 47,2 % des chiens de race sont des mâles. Les mâles non castrés sont plus enclins à mordre que les femelles non stérilisées. Les chiens entiers sont souvent responsables de morsures, en particulier les mâles.
Concernant la race, les bergers allemands sont fréquemment impliqués, mais ces données doivent être interprétées prudemment pour éviter la stigmatisation. Aux États-Unis, les pitbulls et les chiens croisés sont souvent mentionnés, bien que la race soit parfois inconnue.
La taille et le poids des chiens influencent la gravité des morsures. Les chiens de plus de 25 kg causent plus de blessures graves. La plupart des morsures sont infligées par des chiens connus de la victime, souvent le chien familial. Les troubles de comportement et les problèmes de santé peuvent augmenter l’agressivité des chiens. La récidive varie selon les études : certains chiens n’ont jamais mordu auparavant, tandis que d’autres ont déjà mordu.
Quelles sont les principales victimes de morsure ?
Une étude du European Home and Leisure Accidents Surveillance System (EHLASS), rapporte 500 000 morsures annuelles en France, dont 60 000 nécessitent des soins hospitaliers. Cependant, aucune statistique officielle n’existe concernant le nombre de morsures. Les chiffres, basés uniquement sur les consultations médicales, indiquent quelques milliers de morsures par an, mais sont probablement sous-estimés.
En Espagne, une étude (1995-2004) montre une incidence annuelle des morsures canines de 12,8 pour 100 000 habitants dans les zones à forte densité humaine contre 71,3 pour 100 000 dans les zones à faible densité. En Belgique, une enquête téléphonique révèle une incidence annuelle de 2,2 % chez les enfants. Moins de la moitié de ces morsures sont rapportées à une autorité.
À l’hôpital Trousseau, sur 237 cas de morsures (1991-1994), 35,7 % des enfants mordus ont moins de 5 ans. Entre mai et juin 2010, sur 485 victimes de morsures dans huit hôpitaux français, 36 % étaient des enfants de moins de 15 ans.
En Italie, une étude portant sur 1160 patients identifie les 20-29 ans comme les plus touchés. Aux États-Unis, sur 111 chiens ayant mordu un enfant, 31 % des victimes avaient moins de 6 ans. En Espagne, les enfants de moins de 15 ans ont un risque trois fois plus élevé d’être mordus qu’un adulte.
Les études françaises n’identifient pas de corrélation significative entre le sexe de la victime et la probabilité de morsure, bien que les garçons soient légèrement plus souvent mordus que les filles. En Italie et en Espagne, les hommes sont généralement plus à risque que les femmes.
Que dit la loi à propos des chiens ayant mordus ?
Le Code rural et de la pêche maritime et l’arrêté ministériel du 21 avril 1997 régissent la surveillance des animaux mordeurs pour évaluer leur comportement et vérifier l’absence de risque de rage. Les propriétaires doivent déclarer toute morsure à la mairie de leur commune. L’animal mordeur doit être surveillé par un vétérinaire pendant 15 jours, avec des visites obligatoires aux 1er, 7ème et 15ème jours. En cas de décès ou d’euthanasie, la tête de l’animal est envoyée à l’Institut Pasteur pour diagnostic de la rage.
Une évaluation comportementale par un vétérinaire habilité est requise, et son rapport est transmis au maire, qui peut imposer une formation au propriétaire. Le propriétaire est responsable des dommages causés par son animal, selon l’article 1243 du Code civil. En cas de danger grave, le maire peut ordonner l’euthanasie après avis vétérinaire.
Pendant la surveillance, l’animal ne peut être vacciné contre la rage. Si aucun signe de rage n’est détecté, un certificat final est délivré, dont un exemplaire est remis à la mairie et un autre à la personne mordue.