L’Herpès B, aussi appelé virus B ou Herpèsvirus simiae, est un virus zoonotique rare mais potentiellement mortel pour les humains. Originaire des macaques, il peut provoquer des infections graves chez les personnes exposées par morsure, griffure ou contact avec les sécrétions des singes infectés. Bien que rare, l’infection par l’Herpès B chez l’humain nécessite une attention médicale urgente. Elle peut entraîner des complications neurologiques graves et présente un taux de mortalité élevé.
En santé animale, l’herpès virus B du singe, ou Herpesvirus simiae, est une maladie réputée contagieuse. En santé publique, ce n’est pas une maladie humaine à déclaration obligatoire. Elle ne fait pas l’objet d’un tableau de maladie professionnelle à ce jour. Cependant, on classe l’herpès virus B du singe dans le groupe de danger 3 (R. 231-61-1 du code du travail). Cela indique un risque élevé de transmission et de gravité pour l’humain, nécessitant des mesures de précaution strictes lors de la manipulation d’animaux potentiellement infectés.
Quel est le virus responsable ?
Herpesvirus simiae (herpès virus B du singe) est différent des virus de l’herpès humain (herpesvirus hominis). Le virus de l’herpès B, ou Macacine alphaherpesvirus 1, appartient au genre Simplexvirus et à la famille des Herpesviridae. Ce virus neurotrope est pathogène pour l’humain et peut entraîner de graves méningoencéphalites souvent mortelles. Il est apparenté aux virus de l’herpès humain type 1 et 2 (HHV-1 et HHV-2), et est hautement prévalent chez les macaques.
Le virus de l’herpès B est un virus à ADN bicaténaire linéaire enveloppé de 120 à 200 nm de diamètre, similaire en structure à HSV1 et HSV2. Les glycoprotéines de l’enveloppe montrent une réactivité sérologique croisée avec ces derniers. La nucléocapside du virus de l’herpès B, formée de 6 protéines, est icosaédrique (T = 16.
L’enveloppe, lâche autour de la capside virale, contient au moins 10 glycoprotéines. Ces glycoprotéines sont essentielles pour l’adsorption et la pénétration dans les cellules hôtes. Le tégument, situé entre la capside et l’enveloppe, contient au moins 14 protéines virales. Ces protéines jouent un rôle dans le métabolisme des acides nucléiques, la synthèse de l’ADN et le traitement des protéines.
En 2003, les scientifiques ont entièrement séquencé le génome du virus de l’herpès B à partir d’un isolat extrait d’un macaque rhésus. Comme tous les virus de l’herpès, il contient de l’ADN double brin d’environ 157 KpB. Les analyses de séquences suggèrent que le virus de l’herpès B et les HSV types 1 et 2 ont un ancêtre commun. Chaque glycoprotéine codée par gène montre environ 50 % d’homologie avec HSV.
Il possède un génome riche en guanine et en cytosine (75 %). Cela suggère des structures secondaires de glycoprotéines similaires à celles de l’HHV. Le comportement du CeHV-1 en culture cellulaire est similaire à celui de l’HHV-1, avec un cycle de multiplication virale identique.
Comment se manifeste la maladie chez l’animal ?
Les singes, principalement les macaques, peuvent être infectés par le virus de l’herpès B. L’infection est fréquente chez les macaques en Asie, notamment chez les Macaca mulatta (singe rhésus) et Macaca fascicularis (macaque crabier). Les macaques cynomolgus de l’île Maurice sont réputés indemnes. Le virus se trouve chez plus de 80 % des macaques adultes en Asie et en Afrique, atteignant parfois 100 % dans certaines zones. En revanche, il n’a pas été détecté chez les singes américains et malgaches.
La transmission du virus de l’herpès B se fait par la voie sexuelle, par morsure ou griffure. Aussi, cette dernière est possible par voie aérienne (gouttelettes de salive). Chez les macaques, l’infection est souvent asymptomatique. Dans certains cas, des vésicules ou aphtes peuvent apparaître dans la bouche, sur les lèvres, ou sur les muqueuses génitales et conjonctivales. Chez les autres singes, l’infection peut être mortelle, affectant le système nerveux central.
La primoinfection chez le macaque se manifeste souvent par des conjonctivites ou des infections oropharyngées. La plupart des macaques infectés sont porteurs sains. Mais, certains événements stressants (chirurgie, mise bas, long transport, modifications environnementales, etc.) peuvent réactiver le virus. Cela favorise son excrétion et augmente les risques de transmission. Les principales sources d’infection sont les sécrétions des voies aériennes supérieures, la salive, le liquide céphalorachidien et les vésicules cutanées.
Le virus de l’herpès B est prévalent chez les singes macaques de l’ancien monde d’origine asiatique et peut se réactiver en cas de stress, entraînant une élimination par la salive.
Quelle est son mode de contamination ?
La transmission de l’herpès B à partir d’un singe en captivité se fait principalement par morsure, griffure ou piqûre avec du matériel souillé. La transmission se fait également par voie oculaire lorsqu’une main contaminée touche les yeux ou en cas de projections de salive. Depuis 1932, les autorités ont déclaré moins de 40 cas d’infection humaine dans le monde.
Les activités professionnelles à risque incluent tout travail en présence de singes, notamment en provenance d’Asie et d’Afrique, ou de prélèvements provenant de singes, tels que :
- Animaleries de laboratoires de recherche
- Soins vétérinaires
- Laboratoires de recherche
- Services de l’équarrissage
- Parcs zoologiques et parcs animaliers
L’herpès virus B est transmissible à l’humain. Les victimes de cette zoonose sont principalement des vétérinaires, du personnel de centres de primatologie, des animaleries ou laboratoires, des équarrisseurs et des personnes travaillant dans les zoos ou cirques. La contamination survient surtout lors de morsures, griffures ou l’exposition de lésions cutanées, de muqueuses ou des yeux à des sécrétions ou prélèvements biologiques infectés. Le virus est extrêmement contagieux et la transmission peut se produire par une simple égratignure.
Les manipulations d’objets contaminés, comme des cages, ont occasionné quelques rares transmissions à l’humain. Cela inclut un cas lors de la manipulation d’un crâne de macaque rhésus. Les professionnels ont rapporté un seul cas de transmission interhumaine. Ce cas résultait d’un contact entre une plaie de morsure de macaque crabier et une lésion cutanée préexistante.
Depuis l’identification du virus B en 1932, les documents font état de 50 personnes infectées, avec 21 décès. Les animaux porteurs sont particulièrement contagieux lors de leur primoinfection ou de la réactivation du virus. Le passage du singe à l’homme peut se faire sur la base d’une simple égratignure. Tout animal porteur doit être considéré comme potentiellement contagieux.
À quoi ressemble l’herpes B chez l’Homme ?
Les premiers symptômes de l’infection par le virus de l’herpès B apparaissent entre 2 jours et 6 semaines après la contamination. Ils incluent des démangeaisons et une lymphadénopathie près du site d’inoculation. L’infection se manifeste rapidement par une fièvre, parfois accompagnée d’éruptions vésiculeuses, de douleurs diffuses, d’engourdissement des extrémités, de fourmillements et d’autres troubles neurologiques.
Sans traitement, les symptômes évoluent vers des maux de tête, des nausées, des vertiges, des pertes de connaissance, une rétention urinaire, une détresse respiratoire, une hémiplégie et une paralysie ascendante progressive. Cela aboutit souvent à une méningo-encéphalite par dissémination le long du système nerveux, via la moelle épinière jusqu’au cerveau. Ce phénomène peut entraîner un coma. La plupart des cas non traités résultent en des séquelles neurologiques graves et invalidantes ou la mort.
L’incubation du virus varie de 3 jours à 4 semaines. Après l’inoculation, le virus se dissémine le long du système nerveux central jusqu’à la moelle épinière et l’encéphale. Ainsi, il provoque une nécrose ascendante.
Cliniquement, l’infection se présente comme une encéphalomyélite ascendante fébrile, avec une réaction cutanée vésiculeuse au point de morsure et une paralysie des centres respiratoires. Cela évolue dans 70 % des cas vers la mort ou des séquelles importantes chez les survivants. Les premiers symptômes incluent souvent un prurit au site de la morsure, des vésicules et une lymphadénopathie, suivis d’un syndrome pseudo-grippal avant l’apparition des troubles neurologiques.
Comment diagnostique-t-on cette affection ?
Le diagnostic de l’infection par l’herpès virus B (CHV-1) se fait principalement par PCR (identification du génome de l’herpès virus B) à partir des lésions cutanées, du liquide céphalo-rachidien, ou lors des manifestations cliniques et de la nécropsie. Ce test n’est pas disponible en France. Les méthodes de détection du CHV-1 incluent :
- Culture de l’agent obtenu à partir d’échantillons prélevés par écouvillonnage, de liquide céphalorachidien et de matériel prélevé par biopsie aux points d’infection (morsures et égratignures)
- Réaction en chaîne de la polymérase (PCR)
- Test ELISA
- Transfert Western
- PCR-hybridation sur microplaque
En raison d’une forte réactivité croisée avec le virus herpès simplex types 1 et 2, les analyses du sérum humain présentent un intérêt diagnostique limité. L’imagerie par résonance magnétique (IRM), la tomodensitométrie (TDM) et l’électroencéphalogramme (EEG) peuvent être utilisés pour détecter les signes neurologiques de l’infection par le CHV-1. Les méthodes de diagnostic ne sont pas disponibles dans tous les pays. Le taux de mortalité chez les patients non traités est de 70 à 80 %.
Les sujets mordus ou agressés présentent un haut risque si la plaie est profonde, localisée au visage, au cou, au thorax, aux mains, ou si elle est causée par une piqûre profonde. L’exposition au tissu nerveux, aux larmes, à la salive, aux urines ou aux fèces, ainsi qu’aux sécrétions génitales ou par projection oculaire augmente également le risque. Le risque est moindre en cas d’AES car il n’y a pas de virémie.
Quel est son traitement ?
En cas de plaie, il est crucial de la laver pendant 15 à 20 minutes avec une solution de NH4+, polyvidone-iodée, ou chlorhexidine. Pour les lésions oculaires, une irrigation avec une solution oculaire ou saline est nécessaire pendant 15 minutes.
En cas de morsure, griffure ou contact d’une peau lésée ou d’une muqueuse avec des sécrétions d’un animal contaminé, il faut laver immédiatement les plaies et zones de contact avec du savon. Laissez saigner sous une eau courante. Rincez abondamment, désinfectez et consultez un médecin en urgence. Celui-ci doit prescrire, dans les heures suivant l’incident, des antiviraux spécifiques pour une durée de 3 semaines.
Les médecins utilisent l’aciclovir, le valaciclovir ou le ganciclovir en perfusion en milieu spécialisé pendant plusieurs mois en cas d’apparition des symptômes. Le taux de létalité dépasse 60 % même avec un traitement adapté et atteint près de 80 % chez les personnes non traitées. Des rechutes sont possibles en cas d’interruption précoce du traitement.
La fréquence de l’immunité anti-herpès virus de type B est inconnue, et l’immunité contre l’herpès humain ne protège pas contre le virus B du singe. Il n’existe pas de vaccin disponible.
Le tétanos et la rage doivent être systématiquement évoqués et prévenus. Le traitement préventif contre l’herpès B doit commencer le plus rapidement possible, idéalement dans les 48 heures. Un kit de premier usage avec du valaciclovir doit être disponible dans les laboratoires.
La prophylaxie antivirale comprend l’aciclovir, le valaciclovir, et le ganciclovir pour une durée minimale de 14 à 21 jours. En cas de signes neurologiques ou de preuve d’infection virale, le traitement doit se prolonger jusqu’à obtention de contrôles virologiques négatifs, parfois pendant plusieurs années selon la littérature américaine.
Quels sont les moyens de prévention disponibles ?
Il n’y a pas de vaccin disponible. De plus, l’immunité contre HSV1 et HSV2 ne protège pas contre le virus de l’herpès B. Outre les règles sanitaires à l’importation, les principaux moyens de prévention incluent une hygiène scrupuleuse du matériel de travail, comme les cages des singes, et l’isolement systématique des spécimens suspects, suivi de contrôles sérologiques. Le port de gants adaptés et de protections oculaires réduit également les risques de contamination. Il est conseillé d’éviter de s’approcher des singes potentiellement infectés lors de voyages dans ces régions.
Pour prévenir l’infection chez les humains, il faut maintenir une hygiène générale rigoureuse. Cela inclut le nettoyage et la désinfection des locaux et des matériels. Il est aussi essentiel de stocker les déchets et les cadavres animaux dans des conteneurs réfrigérés. Les salariés doivent recevoir une formation adéquate sur les risques liés à l’herpès B et sur les mesures de prévention.
En cas de suspicion d’herpès B chez un singe, les mesures de lutte comprennent l’isolement des singes suspects, la réalisation de sérologies, et l’euthanasie en cas d’infection confirmée. Les professionnels doivent également tester sérologiquement les singes en contact avec le singe suspect. Les responsables restreignent l’accès du site de l’isolement aux seuls professionnels indispensables et lavent et désinfectent les sites contaminés.
Pour réduire les sources de contamination possibles, portez des vêtements à manches longues, un écran facial ou des masques chirurgicaux et lunettes, ainsi que des gants résistants lors des soins aux animaux. Nettoyez les déjections animales avec précaution et manipulez les cadavres ou déchets animaux avec des gants étanches.
En cas de morsure, griffure ou blessure, consultez immédiatement un médecin informé sur l’herpès B.
Quelques données épidémiologiques…
Les scientifiques ont identifié le virus de l’herpès B pour la première fois en 1932, après la mort du Dr William Brebner, un jeune médecin que la morsure d’un singe a infecté lors de recherches sur le virus de la poliomyélite. Après la morsure, Brebner a développé un érythème, une lymphangite, une lymphadénite, et finalement une myélite transverse. Les tissus neurologiques de son autopsie ont révélé un agent semblable au HSV.
Un an plus tard, le Dr Albert Sabin a identifié cet agent et l’a nommé Virus B. Gay et Holden l’ont appelé W Virus en hommage à Brebner. Sabin a démontré que le virus est létal, quelle que soit la voie d’inoculation. Il a également montré que l’herpès B induit des réponses immunologiques similaires à HSV-1 et partage des similitudes avec HVP-2 et Langur herpesvirus.
En 1959, les chercheurs ont identifié le virus de l’herpès B comme l’agent causal de 17 cas humains, dont 12 mortels. Le National B Virus Resource Center de l’Université d’État de Géorgie a signalé les derniers cas en 2008. De nouveaux cas sont apparus en 2021 en Chine.
Depuis 1932, les spécialistes ont décrit environ 50 cas, dont 21 décès. La plupart des infections sont survenues après des morsures, griffures, ou expositions percutanées en contexte de laboratoire.
En 2021, la Chine a rapporté une première infection humaine par le virus de l’herpès B chez un vétérinaire de 53 ans à Pékin. En effet, il est décédé après avoir disséqué des singes. Puis, en avril 2024, les autorités sanitaires de Hong Kong ont rapporté un nouveau cas chez un homme de 37 ans, blessé par des singes sauvages. Il est actuellement en soins intensifs, avec un échantillon de liquide céphalo-rachidien testé positif au virus.
Des cas d’herpès B ont également été signalés aux États-Unis, au Canada, au Japon (premier cas en 2019) et en Chine continentale (premier cas en 2021). Le virus ne se transmet pas d’un humain à un autre. Cependant, il représente une menace zoonotique pour les travailleurs en contact avec des singes.