Plantes à alcaloïdes, remèdes ou poisons ?

Le mot alcaloïde est un terme générique pour désigner des composés plus ou moins complexes d’origine végétale dont les principales caractéristiques sont la présence d’azote dans la molécule et une alcalinité plus ou moins prononcée. À faible dose, ils ont des propriétés physiologiques et pharmaceutiques, mais présentent une forte toxicité à des doses élevées. Parmi les alcaloïdes les plus connus figurent les extraits du pavot : codéine, morphine (découverte en 1805 dans l’opium). On en connaît aujourd’hui plus d’un millier, dont la strychnine, la quinine, l’atropine, la colchicine, tous d’origine végétale.

La science des poisons

La pharmacologie est indissociable de la toxicologie. La toxicologie est la science des poisons ; elle peut se résumer en une seule phrase : « L’important, c’est la dose ! »

Selon Théophraste von Hohenheim, plus connu sous le nom de Paracelse, toutes les substances actives renferment un potentiel toxique. Cette toxicité dépend essentiellement de la dose administrée. Pour comprendre précisément l’impact d’un poison, il convient d’analyser la quantité qui atteint un organe spécifique. Cette analyse implique l’étude du profil toxicocinétique, soit le devenir de la substance dans l’organisme, ainsi que du profil toxicodynamique, qui concerne l’action de la substance sur sa cible.

Les centres antipoison, intégrés dans huit centres hospitaliers universitaires, se spécialisent en toxicologie médicale. Ils assurent la prise en charge des cas d’intoxication grâce à un service de télémédecine disponible en permanence. Leur rôle s’étend à la vigilance sanitaire, notamment à travers la toxicovigilance.

Des équipes multidisciplinaires, incluant médecins, pharmaciens et infirmiers, offrent des diagnostics et des conseils pour le traitement des intoxications. L’Association « Centres antipoison de France » promeut leur activité et encourage la collaboration entre ses membres.

Les centres antipoison français collaborent avec mycologues et botanistes pour identifier rapidement plantes et champignons. Les réseaux mycoliste et phytoliste, lancés en 2014 et 2017, facilitent cette identification via l’analyse de photos et de descriptions. Ces outils sont particulièrement utiles pour les cas impliquant des enfants, principalement touchés par ces intoxications.

Les Alcaloïdes

Les alcaloïdes, composés azotés naturels, proviennent principalement de plantes. Ils se forment à partir d’acides aminés. En pharmacologie, leur diversité structurelle et leur origine végétale permettent des applications variées. Ils agissent principalement sur le système nerveux, soit à des fins thérapeutiques, soit comme agents toxiques.

On regroupe les alcaloïdes en plusieurs catégories selon leur structure chimique. Parmi celles-ci, on trouve les alcaloïdes diterpéniques comme l’aconitine, les tropaniques provenant de la belladone, les alcaloïdes à noyau tropolone tels que la colchicine, ainsi que d’autres groupes comme les quinolizidiniques, les pipéridiniques et les stéroïdiques.

Ces molécules, souvent basiques, provoquent des réactions chimiques particulières, telles que la précipitation ou la coloration. Leur activité pharmacologique est notable, même à faible dose. Bien qu’associés à une toxicité aiguë, ils sont intégrés dans l’industrie pharmaceutique depuis le XIXe siècle.

Le nom des alcaloïdes se termine généralement par « -ine » (nicotine, caféine, morphine). Présents sous forme de mélanges complexes dans les plantes, champignons et certains animaux, des alcaloïdes sont toxiques. Parmi eux, la strychnine ou l’aconitine, extrêmement nocifs à l’état pur. D’autres, à doses contrôlées, servent en médecine. Ils ont des propriétés analgésiques, sédatives, antipaludiques ou anticancéreuses.

Le terme « alcaloïde », venant de « alcali », indique leur nature basique. Utilisé dès le début du XIXe siècle, il a marqué la chimie organique et la pharmacologie. Plus de 8 000 alcaloïdes ont été identifiés, enrichissant la science des substances naturelles.

Les alcaloïdes tropaniques

Les alcaloïdes tropaniques (AT), caractérisés par un cycle de tropane, se trouvent dans de nombreuses Solanacées et érythroxylacées. Divisés en trois groupes principaux – hyoscyamine et scopolamine, cocaïne, et calystégines – ces AT partagent une structure de base similaire mais diffèrent grandement en termes de propriétés biologiques, chimiques et pharmacologiques.

La scopolamine, aussi connue sous le nom d’hyoscine, est largement commercialisée comme agent pharmacologique contre les nausées, vomissements, le mal des transports, et les spasmes musculaires lisses. La cocaïne, quant à elle, est la deuxième drogue illicite la plus consommée au monde. Les AT représentent donc une grande diversité structurelle au sein des plantes et sont l’objet de recherches et de productions innovantes, notamment via la culture tissulaire et la biosynthèse microbienne.

Ces alcaloïdes sont soit des esters de 3α-tropanole (tropine) ou de 3β-tropanole (pseudotropine). Leur biosynthèse débute avec les acides aminés ornithine ou arginine et mène au cation N-méthyl-A1-pyrrolinium, précurseur commun à tous les AT. Malgré leur similitude structurelle, les effets pharmacologiques de ces composés varient considérablement.

La culture des plants de coca et la production de cocaïne sont majoritairement illégales. Les calystégines, un groupe récemment découvert d’AT, n’ont pas encore suscité d’intérêt pharmaceutique, médical ou économique notable. En revanche, la scopolamine présente un intérêt économique significatif en raison de ses applications pharmaceutiques diverses, étant même classée comme médicament essentiel par l’OMS. Sa demande mondiale est en hausse.

Enfin, les changements climatiques posent des défis à l’industrie pharmaceutique pour la production constante de scopolamine. Des méthodes alternatives de production sont en cours d’exploration pour pallier ces défis.

Les solanacées officinales

Ce groupe est caractérisé par la présence d’alcaloïdes ayant tous des propriétés parasympatholytiques provoquant en particulier une mydriase. Les Solanacées constituent une famille botanique importante qui comprend d’une part, des plantes toxiques parmi lesquelles il faut citer la Belladone, la Datura et la Jusquiame noire.

Les symptômes d’intoxication apparaissent entre 30 minutes et 2 heures après ingestion. En cas grave, l’intoxication peut mener au coma et décès.

Le Datura stramoine, ou Datura stramonium, est une plante des lieux incultes, notoire pour sa haute toxicité. Elle renferme des alcaloïdes tropaniques, tels que l’atropine et la scopolamine, antagonistes des récepteurs muscariniques de l’acétylcholine. Toutes les parties du Datura, y compris feuilles, fleurs et graines, sont extrêmement toxiques, parfois mortelles.

Les intoxications par cette plante surviennent souvent volontairement, pour ses effets toxicomanogènes, mais des cas involontaires existent, dus à des confusions alimentaires. Consommer 1 à 5 fleurs ou environ 100 graines peut entraîner des symptômes graves. Après ingestion, les symptômes comprennent nausées, vomissements, diarrhées, rougeur cutanée, sécheresse de la bouche, tachycardie, mydriase, hallucinations, et en cas extrêmes, coma et décès.

Le traitement d’une intoxication au Datura nécessite une hospitalisation, avec évacuation du toxique, réhydratation, et administration de sédatifs et d’antidotes comme la physostigmine.

La Belladone, ou Atropa belladonna, plante des Solanacées, se distingue par ses fleurs mauves tubulaires et baies noires toxiques. L’ingestion de 2-3 baies peut intoxiquer un enfant, et 10-15 peuvent être mortelles pour un adulte.

Les intoxications sont souvent accidentelles, en particulier chez les enfants, et peuvent survenir dans un contexte suicidaire chez l’adulte. Le traitement inclut l’évacuation du toxique et l’administration de physostigmine.

Malgré sa dangerosité, la belladone a des usages en médecine et cosmétique, illustrant la maxime de Paracelse : « la dose fait le poison ». Sa gestion doit être prudente pour éviter des intoxications mortelles.

L’atropine et l’hyoscyamine

Les alcaloïdes tropaniques (AT), tels que l’atropine et l’hyoscyamine, proviennent de plantes solanacées comme la belladone, la datura et la jusquiame noire. Historiquement, on les reconnaissait pour leurs propriétés aphrodisiaques et leur usage dans les onguents des ‘sorcières’. Aujourd’hui, ces composés servent en médecine comme médicaments anticholinergiques. Ils agissent comme antagonistes des récepteurs muscariniques de l’acétylcholine, influençant ainsi le système nerveux central et périphérique.

À forte dose, ces alcaloïdes peuvent entraîner une excitation intense, menant à un délire atropinique. Les doses thérapeutiques des alcaloïdes tropaniques induisent des réactions modérées. Cependant, la sensibilité individuelle varie. Elle est particulièrement élevée chez les jeunes enfants, les animaux et les personnes âgées. Ces alcaloïdes influencent le système nerveux autonome. Ils produisent des effets parasympatholytiques distincts. Parmi les symptômes, on observe la mydriase (dilatation de la pupille), la bronchodilatation, la vasoconstriction, l’accélération du rythme cardiaque, le ralentissement du péristaltisme et une réduction des sécrétions.

Les alcaloïdes tropaniques (AT) remontent loin dans l’histoire de la médecine traditionnelle. Leurs applications sont variées, des effets hallucinogènes et analgésiques à l’usage comme poisons. Ils s’absorbent rapidement, se distribuent dans l’organisme et s’excrètent via le système rénal. La scopolamine se donne souvent par voie transdermique, due à sa courte demi-vie plasmatique et à ses effets secondaires liés à la dose.

Ces alcaloïdes se révèlent utiles comme médicaments potentiels pour traiter diverses maladies liées à un dysfonctionnement du système cholinergique muscarinique. L’hyoscyamine sert comme antidote contre certaines toxines, et la physostigmine est l’antidote pour les intoxications à la scopolamine et à l’hyoscyamine.

Les effets indésirables de l’atropine incluent tachycardie, mydriase, confusion mentale, pouvant conduire à une grave intoxication ou même la mort à hautes doses. L’OMS la classe comme médicament essentiel. Les plantes productrices d’AT, répandues dans le monde, sont faciles à cultiver. Leurs effets secondaires comprennent bradycardie, sécheresse buccale, transpiration réduite, et inhibition de l’activité sécrétoire des voies respiratoires à doses élevées.

La scopolamine

Aux doses thérapeutiques c’est une substance sédative du système nerveux central et antiparkinsonienne; c’est aussi une substance parasympatholytique (plus faible que l’atropine) et un antispasmodique.

La scopolamine, que l’on appelle aussi tropate de scopine ou hyoscine, se trouve dans les solanacées vireuses. Chimiquement proche de l’atropine, E. Schmidt l’a isolée en 1892. Cette substance est particulièrement présente dans le Datura et le Brugmansia, notamment dans les graines, ainsi que dans les feuilles de Duboisia.

Commercialisée sous forme de bromhydrate de scopolamine, elle est un anticholinergique, agissant par liaison aux récepteurs muscariniques de l’acétylcholine dans le système nerveux central et périphérique. Cet effet bloque l’action du neurotransmetteur, se comportant ainsi comme un parasympathicolytique. Contrairement à l’atropine, la scopolamine a un effet sédatif central. Elle peut causer d’intenses hallucinations délirantes, de l’amnésie antérograde et des pertes de conscience. Active même à des doses infimes, elle peut être mortelle à fortes doses et entraîner des séquelles psychiatriques durables. Durant la Seconde Guerre mondiale, la scopolamine a été testée comme sérum de vérité.

En médecine, la scopolamine figure sur la liste des médicaments essentiels de l’OMS.

La scopolamine sert de spasmolytique et anticholinergique, traitant spasmes, troubles de la motilité gastro-intestinale et constipation spasmodique. Historiquement utilisée contre la maladie de Parkinson, elle a cédé sa place à des anti-parkinsoniens de synthèse. Actuellement, elle trouve son utilité dans le traitement symptomatique de certaines douleurs digestives et gynécologiques, en soins palliatifs, ainsi que dans la prévention du mal des transports.

En astronautique, la scopolamine réduit les effets du mal des transports en micropesanteur lors des vols Zero-G.

La butylscopolamine, variante de la scopolamine avec un groupement butyle, se commercialise sous le nom de Buscopan. Bien qu’elle puisse entraîner des effets secondaires similaires à l’atropine, notamment un risque de somnolence, elle est utilisée dans des spécialités à visée antalgique.

Les alcaloïdes quinolizidiniques

Les alcaloïdes quinolizidiniques se trouvent majoritairement dans certaines espèces de la famille des Fabaceae, notamment dans les lupins. Ces composés sont également présents chez d’autres familles de plantes telles que les Chenopodiaceae, Berberidaceae, Papaveraceae, Nymphaeaceae, Ranunculaceae, Scrophulariaceae, Solanaceae, Asteraceae, Rubiaceae et Ericaceae. Au-delà du règne végétal, ils sont aussi détectés chez des espèces animales, comme dans la famille des Adociidae (Spongiaires). Un exemple notable est l’indigolupine (Baptisia australis), qui contient plusieurs de ces quinolizidines.

Le Genet à balais

Le Genêt à balais (Cytisus scoparius) se présente sous forme d’arbrisseau buissonnant d’environ 1 mètre. Il se distingue par ses fleurs jaunes et la perte précoce de ses feuilles. Cette plante est commune, à l’exception des régions méditerranéennes et nordiques. Ses gousses, très velues et noires à maturité, mesurent entre 4 et 5 cm.

La plante renferme des alcaloïdes quinolizidiniques, issus de la Lysine. Ces composés se trouvent dans toute la plante, y compris les gousses vertes et principalement les graines, avec une concentration de 1,5 à 3 %. La cytisine, un agoniste nicotinique, est l’un de ces alcaloïdes. Les gousses du Genêt à balais, parfois consommées par les enfants en remplacement des haricots, sont à l’origine de plusieurs intoxications graves. L’intoxication à la cytisine se caractérise par une sensation de brûlure de la bouche et de la gorge, des vomissements précoces, et peut entraîner des effets centraux comme délire, excitation, convulsions, et paralysie respiratoire.

En plus des alcaloïdes, le Genêt à balais contient des amines (tyramine, dopamine, épinine), principalement dans les fleurs, des flavonoïdes (scoparoside, génitoside, spiracoside) et d’autres alcaloïdes tels que la spartéine et la lupanine. La spartéine, présente principalement dans les rameaux, est utilisée en pharmacie pour ses propriétés antiarythmiques et ocytociques. Toutefois, en raison de ses effets indésirables, son usage médical est limité.

Traditionnellement, la fleur du genêt à balais était utilisée pour ses propriétés diurétiques et dans le traitement des troubles circulatoires. La plante est également une source importante de pollen pour les abeilles, contribuant à la production de miel.

En agriculture naturelle et en permaculture, le genêt à balais s’avère précieux pour sa capacité à fixer l’azote dans le sol, contribuant ainsi à l’enrichissement de la terre. Dans certaines régions de France, il a également servi à la confection de balais et de toitures. De plus, on a relevé ses propriétés de protection contre les morsures de vipère chez les moutons.

La spartéine

La spartéine, un alcaloïde quinolizidinique, se trouve dans des plantes telles que le genêt à balais (Cytisus scoparius) et diverses espèces de lupins. Elle est connue pour ses propriétés ocytociques et ganglioplégiques. La spartéine isole le cœur des influences du système nerveux autonome, agissant ainsi comme un tonicardiaque.

Utilisée par le passé pour améliorer les contractions utérines lors de l’accouchement, la spartéine a également été employée pour ses effets régulateurs et toniques dans le traitement de certains troubles du rythme cardiaque.

À l’état naturel, elle se présente principalement sous la forme de l’énantiomère (−)-spartéine. Cette substance agit en bloquant les canaux sodium voltage-dépendants. Elle possède des activités ganglioplégiques, ocytociques, et antiarythmiques, ce qui réduit l’excitabilité et la conductibilité au niveau cardiaque.

Classée comme un agent antiarythmique de classe 1a, la spartéine inhibe les canaux sodiques des cardiomyocytes, stabilisant ainsi les membranes et réduisant la conduction électrique dans les cardiomyocytes. Elle diminue de ce fait le rythme cardiaque et la pression artérielle. Malgré son potentiel thérapeutique, on n’utilise plus la spartéine en France et la FDA ne l’a pas approuvée pour l’utilisation humaine en tant qu’agent antiarythmique.

En chimie organique, on utilise la (−) et la (+)-spartéine comme ligands chiraux en synthèse asymétrique. Cela permet une meilleure sélectivité des réactions. La spartéine, sous forme de sulfate de spartéine, est une huile liquide à température ambiante, utilisée pour ses propriétés pharmacologiques distinctes.

La spartéine a également servi comme marqueur de l’activité métabolique du cytochrome CYP2D6, avec des études pharmacocinétiques révélant un polymorphisme génétique lié à ce cytochrome. Des inhibiteurs du CYP2D6, tels que la quinidine, l’halopéridol et le moclobémide, affectent son métabolisme.

Les alcaloïdes isoquinoléiques

Les alcaloïdes isoquinoléiques, dérivés chimiques de l’isoquinoléine, constituent le plus vaste groupe parmi les alcaloïdes. Ils se classent selon leur structure chimique de base, les types les plus courants étant les benzylisoquinoléines et les aporphines. À ce jour, environ 2500 alcaloïdes isoquinoléiques ont été recensés, majoritairement produits par les plantes.

Ces alcaloïdes présentent des effets biologiques variés. Parmi eux, les alcaloïdes de l’opium, tels que la morphine et la codéine, sont reconnus pour leurs propriétés sédatives, psychotropes ou analgésiques et sont utilisés comme antalgiques. La papavérine, quant à elle, possède un effet antispasmodique sur les muscles lisses, notamment dans le tractus gastro-intestinal et les vaisseaux sanguins chez l’homme, d’où son utilisation comme antispasmodique.

Enfin, la tubocurarine affecte la transmission des stimuli dans le système nerveux, pouvant entraîner une paralysie dans l’organisme affecté.

Le Pavot

Le pavot somnifère, ou pavot à opium (Papaver somniferum), vient d’Europe méridionale et d’Afrique du Nord. Il est célèbre pour ses propriétés psychotropes sédatives. Cette plante herbacée annuelle de la famille des Papaveraceae a un usage ornemental et alimentaire. Elle est riche en alcaloïdes opiacés comme la morphine, la codéine, la noscapine et la papavérine.

Il existe deux variétés principales de pavot somnifère. Le Papaver somniferum var. album, ou pavot blanc, sert principalement à l’extraction du latex pour l’opium. Le Papaver somniferum var. nigrum, ou pavot noir, se cultive pour ses graines. Ces graines sont utilisées en agro-alimentaire et pour produire l’huile d’œillette.

On extrait la morphine de cette plante pour son utilisation thérapeutique en raison de ses effets analgésiques. Cependant, elle fait aussi l’objet d’un trafic illicite pour la fabrication de l’héroïne. Bien que l’on utilise largement les graines de pavot en alimentation, elles contiennent une très faible quantité d’alcaloïdes.

Historiquement, on a associé le Papaver somniferum à la magie noire et utilisé pour ses vertus sédatives. En médecine traditionnelle, il a servi dans la fabrication d’extraits tels que la teinture, le laudanum et l’opium. Le pavot somnifère a aussi servi pour ses propriétés antispasmodiques, notamment grâce à la papavérine de ses graines.

La culture du pavot à opium pour l’ornementation des jardins et des espaces verts est répandue. Sa culture à des fins médicales ou narcotiques a évolué au fil du temps. Les graines de pavot, connues pour leurs propriétés aphrodisiaques, servent parfois en phytothérapie. Cependant, on considère généralement la plante comme un poison.

La sélection de pavots à des fins médicinales a permis de développer des variétés adaptées aux climats locaux, optimisant ainsi la production d’opium et de morphine.

La morphine

La morphine, un alcaloïde principal de l’opium extrait du pavot somnifère (Papaver somniferum), possède des propriétés à la fois excitantes et dépresseurs. À faibles doses, elle induit euphorie et bien-être, tandis qu’à fortes doses, elle agit comme un dépresseur, réduisant la perception de la douleur et provoquant somnolence. Ses effets secondaires incluent dépression respiratoire, risque d’apnée, effet antitussif, nausées, vomissements, et ralentissement du péristaltisme intestinal. Au niveau cardiaque, elle entraîne bradycardie, vasodilatation, et hypotension.

Utilisée en médecine comme antalgique majeur, la morphine nécessite une surveillance rigoureuse en raison de ses effets sur le système respiratoire et cardiaque. Découverte en 1804 par l’Allemand Friedrich Wilhelm Sertürner, elle révolutionne l’analgésie. Sous diverses formes (orale, injectable), elle reste un pilier dans le traitement des douleurs intenses, spécialement en oncologie.

La morphine agit en activant les récepteurs opiacés, entraînant analgesie profonde et dépression respiratoire. Sa nature addictive et les risques de dépendance et de sevrage placent la morphine parmi les stupéfiants réglementés. Des composés similaires ont été développés, tels que l’héroïne ou l’oxycodone, et d’autres médicaments tels que le fentanyl et la méthadone appartiennent également à la famille des narcotiques.

Le pavot somnifère est la principale source de morphine, avec une concentration variant de 4 à 21% dans l’opium brut. Le processus de synthèse implique la tyrosine, se transformant en salutaridine et enfin en morphine. Le latex est récolté après la chute des pétales pour être séché et traité.

Les effets indésirables comprennent troubles digestifs et neurologiques, hypotension, bradycardie, et dépression respiratoire. L’accoutumance et le syndrome de sevrage sont des défis majeurs dans son utilisation médicale et dans la lutte contre la toxicomanie. En dépit de ces risques, la morphine demeure un analgesique de référence pour les douleurs sévères, avec un usage encadré pour minimiser les effets indésirables et les risques de dépendance.

La codéine

La codéine, un alcaloïde du pavot somnifère (Papaver somniferum), est similaire à la morphine mais moins toxique. Elle agit comme antitussif d’action centrale, traitant efficacement les toux sèches non productives. On évite son administration en cas d’insuffisance respiratoire, chez les patients asthmatiques et les nourrissons, en raison de contre-indications spécifiques. Dans le domaine de l’analgésie, la codéine se combine souvent avec des analgésiques périphériques pour en augmenter l’efficacité.

L’utilisation de la codéine peut entraîner des risques de somnolence, nausée et constipation. Isolée en 1832 par le chimiste français Pierre Jean Robiquet, son nom dérive du grec « κώδεια » (kốdeia), se référant à la tête de pavot. En tant que morphinique mineur, la codéine est couramment combinée avec du paracétamol ou de l’ibuprofène, renforçant son effet antalgique et classée au palier 2 de l’échelle des antalgiques de l’OMS.

Chimiquement, la codéine se distingue de la morphine par un groupement méthyle en position 3, permettant potentiellement sa conversion en morphine par déméthylation. Cette conversion peut être réalisée dans des laboratoires clandestins pour la production d’héroïne ou de désomorphine.

Pharmacologiquement, la codéine subit un effet de premier passage hépatique, se transformant en morphine à environ 10%. Le cytochrome CYP2D6 est l’enzyme responsable de cette conversion, dont l’activité varie selon le polymorphisme génétique de chaque individu, influençant l’efficacité et les risques de surdosage du médicament. Sa demi-vie d’élimination est de deux à quatre heures.

L’effet analgésique de la codéine est moins puissant que celui de la morphine, réduisant ainsi les risques de surdosage et de dépendance. Son action centrale est plus limitée, rendant son potentiel addictif moindre par rapport à la morphine. De plus, la codéine inhibe partiellement le CYP2D6, modulant ainsi sa propre conversion en morphine.

La noscapine

La noscapine, également connue sous le nom de L-narcotine, est un alcaloïde du pavot somnifère (Papaver somniferum). Découverte en 1803 par Jean-François Derosne, elle se caractérise par sa nature de sédatif de la toux non toxicomanogène. Utilisée dans le traitement des toux sèches non productives, la noscapine est souvent combinée à d’autres principes actifs. Elle est contre-indiquée en cas d’insuffisance respiratoire ou d’asthme.

Proche de la codéine et de la morphine, son nom dérive du grec narkê, signifiant assoupissement. Sous forme de solide cristallisé blanc à saveur amère, la noscapine est un antitussif non narcotique. Bien qu’elle ne provoque généralement pas de dépression respiratoire, de dépendance ou de toxicomanie aux doses thérapeutiques, un surdosage peut entraîner vertiges, somnolence, troubles gastro-intestinaux, excitation-confusion et dépression respiratoire.

La noscapine, agissant sur le récepteur sigma (non opioïde), s’indique pour la toux sèche. Elle peut provoquer des effets secondaires tels que céphalées, nausées et réactions cutanées. On la contre-indique en cas de sécrétion muqueuse importante, chez les enfants de moins de 2 ans (sauf sur avis médical), et en cas d’allergie. La noscapine peut interagir en tant qu’inhibiteur des isoenzymes du CYP450.

Appartenant à la famille des alcaloïdes et étant un dérivé opiacé, la noscapine provient du pavot à opium. Elle est efficace en tant qu’antitussif d’action centrale, sans entraîner de dépression des centres respiratoires, accoutumance ni toxicomanie aux doses thérapeutiques. La dose quotidienne maximale chez l’adulte est de 60 mg.

Les contre-indications incluent la grossesse, les enfants de moins de 30 mois, l’insuffisance respiratoire, la toux de l’asthmatique et le risque d’hypertension intracrânienne. En ce qui concerne les interactions médicamenteuses, on contre-indique son utilisation avec des agonistes et antagonistes morphiniques, en raison du risque de syndrome de sevrage. Il faut l’utiliser avec prudence en association avec l’alcool et d’autres dépresseurs du système nerveux central.

La papavérine

La papavérine est un alcaloïde extrait du latex du pavot (Papaver somniferum). Contrairement à d’autres composés de l’opium, elle n’a pas de propriétés analgésiques ni stupéfiantes, mais elle agit comme un spasmolytique musculotrope. Son principal mécanisme d’action se situe au niveau vasculaire périphérique.

On utilise cette substance dans divers contextes médicaux, notamment comme vasodilatateur périphérique et anti-ischémique. Elle peut se prescrire pour traiter les séquelles d’accidents vasculaires, les traumatismes crâniens, les troubles rétiniens d’origine vasculaire, l’artérite des membres inférieurs et les troubles circulatoires périphériques artériels ou veineux.

La découverte de la papavérine remonte à 1848, lorsque Georg Merck l’a identifiée. Elle a été utilisée en chirurgie cardiaque pour prévenir les spasmes des vaisseaux sanguins lors de l’extraction de greffons artériels. Elle agit en relâchant les fibres musculaires lisses des vaisseaux sanguins, provoquant ainsi une vasodilatation.

De plus, la papavérine intervient dans la relaxation des fibres musculaires lisses des organes creux tels que les intestins et les bronches. Elle joue également un rôle dans le traitement de la dysfonction érectile, où on l’injecte directement dans les corps caverneux du pénis pour augmenter le flux sanguin artériel.

Cependant, l’utilisation de la papavérine peut entraîner des effets secondaires, notamment le priapisme (érections douloureuses sans excitation sexuelle permanente jusqu’à 36 heures) et une inflammation du pénis.

En fin de compte, bien que la papavérine puisse être bénéfique dans certains contextes médicaux, son utilisation dans le traitement des troubles circulatoires périphériques et cérébraux reste controversée. Il convient de noter qu’on a également développé des alternatives plus récentes, telles que la propivérine, pour traiter les spasmes musculaires et les troubles circulatoires.

Les alcaloïdes tricycliques

L’extrait de colchique, mentionné dès le premier siècle de notre ère dans l’ouvrage « De Materia Medica » de Pedanius Dioscoride, s’utilise comme traitement pour la goutte. Cependant, il faut attendre 1820 pour que les chimistes français Pierre Joseph Pelletier et Joseph Bienaimé Caventou isolent l’alcaloïde responsable, la colchicine.

On reconnait la colchicine, un alcaloïde tricyclique,  pour ses propriétés anti-inflammatoires et son efficacité dans le soulagement de la douleur associée à la goutte. Ses effets sont liés à son interaction avec la tubuline, une protéine cellulaire.

La Colchique

Le Colchique d’automne (Colchicum autumnale) est une plante de la famille des Colchicaceae qui contient de la colchicine, un alcaloïde hautement toxique, présent dans toutes ses parties à des concentrations de 0,1 à 1 %. Les intoxications, souvent mortelles, surviennent principalement après ingestion de graines par des enfants ou de bulbes et de feuilles par des adultes.

La dose létale est de 5 g de graines pour un adulte et de 1,5 g pour un enfant. Les symptômes d’intoxication incluent une gastroentérite aiguë, des diarrhées sanglantes, des vomissements, une acidose métabolique, des troubles cardiaques, des complications hépatiques et des troubles neurologiques tels que des convulsions ou un coma.

Thérapeutiquement, la colchicine est utilisée à des doses maximales de 3 mg par jour. Le colchique, malgré son apparence attrayante avec ses fleurs tubulaires rose violacé et ses feuilles linéaires vert brillant, est une plante extrêmement toxique, surtout les graines et le bulbe. Les enfants s’exposent particulièrement à l’intoxication par ingestion accidentelle de graines, tandis que les adultes peuvent s’intoxiquer en confondant les feuilles de colchique avec de l’ail des ours ou du poireau sauvage.

Depuis l’Antiquité, la médecine utilise la colchicine pour traiter diverses affections, notamment la goutte. Sa compréhension thérapeutique s’est progressivement affinée au fil des siècles grâce aux travaux de médecins et chercheurs. Au XVIIIe siècle, le médecin autrichien Anton von Störck a mené des expériences sur lui-même et sur un chien pour déterminer les doses thérapeutiques et toxiques de la colchicine.

L’extraction du principe actif, la colchicine, a ouvert la voie à la pharmacologie moderne, permettant un dosage précis et sûr du médicament. Cependant, en raison de sa toxicité, il est essentiel de respecter les doses prescrites par un professionnel de la santé.

La colchicine

La colchicine présente des propriétés antimitotiques, mais sa toxicité limite son utilisation en tant qu’agent antitumoral et action anti-inflammatoire.

En raison de sa toxicité significative à faible dose, on utilise la colchicine efficacement dès les premiers signes d’une crise de goutte. C’est un alcaloïde tricyclique extrêmement toxique. À l’origine, on l’extrait des plantes du genre Colchicum, surtout du colchique d’automne.

La colchicine se lie à l’albumine sanguine, indépendamment de sa concentration. Elle s’accumule dans les leucocytes, où elle peut rester plusieurs jours. Son métabolisme dépend du Cytochrome P450 3A4. Cela entraîne des interactions médicamenteuses potentielles. Le foie élimine principalement la colchicine.

Sur le plan biologique, la colchicine perturbe le cytosquelette en se liant à la tubuline, ce qui inhibe la polymérisation des principaux constituants des microtubules. Cette action bloque la mitose, réduit la mobilité et l’activité des neutrophiles, engendrant un effet anti-inflammatoire significatif. De plus, elle entrave l’adhésion des neutrophiles à l’endothélium en réduisant l’expression de certaines sélectines, ainsi que la production d’anions superoxydes stimulée par les cristaux d’acide urique. Elle possède également un effet anti-inflammatoire en inhibant le NLRP3, un constituant de l’inflammasome.

La colchicine se prescrit couramment dans le traitement de l’arthrite goutteuse, de la fièvre méditerranéenne familiale (FMF) et de la maladie de Behçet. Elle se révèle efficace pour les péricardites récidivantes ou réfractaires, en complément des traitements anti-inflammatoires classiques. Cette association diminue les symptômes et réduit le risque de récidive. Pour la polychondrite chronique atrophiante, son utilisation en première intention s’avère bénéfique. Par ailleurs, le thiocolchicoside, un dérivé semi-synthétique de la colchicine, trouve son application comme myorelaxant.

Des recherches suggèrent que, sur le long terme, la colchicine pourrait offrir une protection contre les maladies cardio-vasculaires, tant en prévention primaire que secondaire, ainsi que réduire les complications après un infarctus du myocarde.

Les alcaloïdes indoliques

Les alcaloïdes indoliques constituent une catégorie d’alcaloïdes renfermant le groupe fonctionnel indole. Un grand nombre d’alcaloïdes indoliques incluent également des groupes isoprènes, ce qui les classe comme alcaloïdes indole-terpéniques ou dérivés de sécologanine et tryptamine. Cette classe d’alcaloïdes compte parmi les plus importantes, avec la découverte de plus de 4100 composés différents à ce jour. De nombreux parmi eux présentent une activité physiologique significative, et certains sont même utilisés en médecine. Le tryptophane, un acide aminé, est le précurseur biochimique des alcaloïdes indoliques.

L’Ergot de seigle

L’ergot du seigle (Claviceps purpurea Tul.) est un champignon ascomycète parasitant le seigle et d’autres céréales, renfermant des alcaloïdes responsables de l’ergotisme, dont l’acide lysergique, base chimique du LSD.

Les alcaloïdes produits par cet ergot comprennent l’ergométrine, l’ergotamine, l’ergocristine, l’ergocornine, l’alpha-ergokryptine, et l’ergosine, dérivés de l’acide lysergique, ainsi que l’ergocristinine, l’ergometrinine, et d’autres dérivés de l’acide isolysolergique. Ils sont responsables des toxicités chez les humains et les animaux. Les réglementations se fondent souvent sur la proportion d’ergot en poids dans le grain, bien que la quantité d’alcaloïdes ne soit pas directement proportionnelle à celle d’ergot.

Les gènes impliqués dans la biosynthèse de ces alcaloïdes sont regroupés dans un cluster. La première étape comprend la prénylation du tryptophane, suivie de la production de clavines. Une enzyme cruciale, la cytochrome P450 monooxygénase, catalyse la conversion de l’élymoclavine en acide paspalique, un précurseur de l’acide lysergique.

En médecine, les dérivés de l’ergot de seigle, notamment l’ergotamine et l’ergométrine, sont utilisés pour traiter les crises de migraine. Le LSD est un dérivé de l’acide lysergique, synthétisé à partir de l’ergot.

L’ergométrine

L’ergométrine, un alcaloïde de la famille des lysergamides, agit sur l’utérus. Elle augmente le tonus de base, la fréquence et l’intensité des contractions utérines. L’ergométrine stimule les récepteurs adrénergiques du myomètre.

Elle est particulièrement active durant la grossesse. L’ergométrine renforce l’effet utérin. Elle se distingue par son action antihémorragique. Cela est principalement dû à l’induction de l’hypertonie utérine.

Sous la forme de méthylergométrine, ce composé sert de tonique utérin. Il prévient et traite les hémorragies utérines, surtout après l’accouchement. Produite naturellement par le Claviceps purpurea (ergot de seigle) et certaines espèces de Periglandula, l’ergométrine vient de champignons de la famille des Clavicipitaceae. Ces champignons sont associés aux plantes volubilis de la famille des Convolvulaceae.

Historiquement, on utilisait l’ergométrine en obstétrique pour prévenir les hémorragies post-partum. Ses propriétés sont proches de l’ocytocine. Cependant, on l’a remplacée par la méthylergométrine. Ce dérivé synthétique est couramment employé dans ce contexte.

L’ergométrine et la méthylergométrine servent également en diagnostic pour induire des spasmes dans les artères coronaires. Cette induction peut s’effectuer par injection directe dans une artère coronaire ou par administration intraveineuse. Ces substances agissent comme des agonistes des récepteurs sérotoninergiques, entraînant une vasoconstriction artérielle.

Il est important de souligner que la consommation d’ergométrine peut mener à l’ergotisme, une pathologie résultant de son ingestion. Néanmoins, l’ergométrine figure sur la liste des médicaments essentiels de l’Organisation mondiale de la santé.

L’ergotamine

L’ergotamine exerce une vasoconstriction marquée à de faibles doses en stimulant les récepteurs adrénergiques, provoquant ainsi une réaction vasculaire tonique, principalement au niveau périphérique. Toutefois, à des doses élevées, son action devient antagoniste, ce qui signifie qu’elle a un effet adrénolytique, bien que moins prononcé.

Les traitements anti-migraineux exploitent largement les propriétés vasoconstrictrices de l’ergotamine et de ses dérivés. Le tartrate d’ergotamine trouve son utilisation spécifique dans le traitement des crises de migraine et des céphalées vasomotrices. Son administration doit se faire dès l’apparition des premiers symptômes précurseurs pour une efficacité optimale. Par ailleurs, la dihydroergotamine sert en traitement de fond pour la migraine. L’ergotamine figure dans le tableau I de la Convention contre le trafic illicite de stupéfiants et de substances psychotropes de 1988.

Arthur Stoll a isolé l’ergotamine en 1918, marquant son introduction comme premier alcaloïde de la famille des ergolines employé à des fins thérapeutiquesElle a rapidement trouvé sa place dans la pharmacopée, servant à traiter les migraines et à agir comme utérotonique, vasoconstricteur ou hémostatique.

Les intoxications à l’ergotamine surviennent en cas de surdosage ou en présence d’interactions médicamenteuses défavorables, notamment avec certains antibiotiques macrolides.

Sur le plan mécanique, l’ergotamine agit comme un agoniste des récepteurs 5-HT2 de la sérotonine, et à des doses élevées, elle agit en tant qu’agoniste partiel des récepteurs α-adrénergiques et des récepteurs sérotoninergiques. Le récepteur 5-HT2, couplé à une protéine Gq, initie une cascade de signalisation provoquant une vasodilatation crânienne caractéristique de la migraine.

La Pervenche tropicale

La Pervenche de Madagascar (Catharanthus roseus) est une plante herbacée vivace originaire de Madagascar. Elle appartient à la famille des Apocynacées et se cultive largement dans les régions tropicales et subtropicales. Reconnue pour contenir les molécules de vincristine et de vinblastine, elle sert en chimiothérapie pour divers cancers. Cette plante peut mesurer environ 1 mètre de hauteur. Elle possède des feuilles opposées, ovales à oblongues, et produit des fleurs blanches à roses. Ces fleurs ont un tube basal et une corolle à cinq lobes étalés. Les fruits sont des paires de follicules.

La Pervenche de Madagascar possède des propriétés vasoconstrictrices à faible dose. Elle stimule les récepteurs adrénergiques. Elle joue un rôle important dans le traitement de la migraine. En particulier, le tartrate d’ergotamine sert pour les crises aiguës et la dihydroergotamine en traitement de fond. Des intoxications peuvent survenir en cas de surdosage ou d’interactions médicamenteuses inadéquates. C’est notamment le cas avec certains antibiotiques macrolides.

La vincristine

La vincristine, un alcaloïde extrait de la pervenche de Madagascar (Catharanthus roseus), sert en chimiothérapie pour soigner divers types de cancers. Elle fait partie des poisons du fuseau mitotique, inhibant la polymérisation des microtubules pendant la mitose. On a découvert ce médicament en 1965 à partir de la pervenche de Madagascar, plante tropicale endémique riche en alcaloïdes.

La vincristine a une action cytotoxique sur les cellules cancéreuses. Elle empêche la formation du fuseau mitotique lors de la division cellulaire. Cela conduit à l’arrêt de la mitose et à l’apoptose. On l’utilise principalement dans le traitement de la leucémie aiguë lymphoblastique. Elle sert aussi contre la maladie de Hodgkin, les lymphomes non hodgkiniens, et d’autres cancers. Parmi ces cancers, on trouve le rhabdomyosarcome, l’ostéosarcome et le cancer du sein.

L’extraction des alcaloïdes de la pervenche de Madagascar se fait à partir de ses feuilles, tiges et fleurs, en utilisant divers solvants comme le méthanol, le chloroforme ou le dichlorométhane.

On administre la vincristine par voie intraveineuse, généralement chaque semaine en monochimiothérapie et chaque mois en polychimiothérapie. Toutefois, il faut injecter avec précaution, car une injection extravasculaire peut provoquer une nécrose des tissus.

Les effets secondaires de la vincristine incluent principalement la neuropathie périphérique, des troubles gastro-intestinaux, des vomissements, une perte de poids, ainsi que des effets indésirables moins fréquents tels que des convulsions, une hypertension, des troubles sensitifs et des problèmes hématotoxiques. Le surdosage de vincristine peut aggraver ces effets indésirables.

La vincristine est contre-indiquée chez les patients atteints de neuropathie, pendant la grossesse et l’allaitement, et chez ceux présentant des pathologies cardiaques ou une dysfonction hépatique. Une surveillance étroite est nécessaire pour prévenir les complications liées à ce traitement.

La vinblastine

La vinblastine et le sulfate de vinblastine sont des substances toxiques extraites de la pervenche de Madagascar (Catharanthus roseus). On l’utilise principalement en médecine pour le traitement de divers types de cancer, notamment le cancer du poumon, le cancer du sein et les lymphomes.

La vinblastine agit comme un poison du fuseau mitotique, entravant la polymérisation de la tubuline pour former des microtubules. Cette action bloque le processus de division cellulaire, entraînant préférentiellement la mort des cellules cancéreuses.

L’histoire de la vinblastine débute en 1952. Une patiente en Jamaïque a envoyé des feuilles d’un arbuste malgache, Vinca rosea, à Clark Noble. Il est connu pour sa découverte de l’insuline. Robert Laing Noble, frère de Clark Noble et directeur associé du Collip Medical Research Laboratory à Toronto, a pris le projet en main. À partir de 1954, Charles T. Beer, un chimiste organicien, a rejoint l’équipe. Ensemble, ils ont isolé et caractérisé un puissant alcaloïde dans ces feuilles : la vinblastine.

La vinblastine sert dans le traitement de plusieurs affections. Parmi elles, la maladie de Hodgkin, les lymphomes non hodgkiniens, le cancer du testicule, le sarcome de Kaposi, les choriocarcinomes, le cancer de l’ovaire, le cancer du sein, le cancer du rein, le cancer de la vessie, certains cas d’histiocytose et la leucémie aiguë lymphoblastique (LAL B).

L’effet indésirable majeur de la vinblastine est la leucopénie, ce qui limite la dose administrée. Parmi les autres effets indésirables figurent la toxicité neurologique, se manifestant par la constipation et les douleurs abdominales, ainsi que des neuropathies périphériques accompagnées de paresthésies. L’alopécie (perte de cheveux) est également un effet secondaire, généralement temporaire.

La vinblastine est répertoriée comme un médicament essentiel par l’Organisation mondiale de la santé, mise à jour en avril 2013.

La Petite pervenche

La Petite Pervenche (Vinca minor L.), appartenant à la famille des Apocynacées, est une plante herbacée vivace caractérisée par ses fleurs.

Elle se distingue par des tiges rampantes et érigées issues d’une base sarmenteuse. Ses feuilles, ovales, opposées, de couleur vert foncé, sont parcheminées et persistantes. La plante produit des fleurs solitaires terminales, bleues, avec 5 pétales carrés asymétriques.

Sur le plan de la composition, cette plante contient entre 0,3 à 1 % d’alcaloïdes totaux. La vincamine, représentant environ 10 % de ces alcaloïdes, est accompagnée par une trentaine d’autres alcaloïdes indoliques, incluant des types éburnane, aspidospermane, binaire et corynanthéane.

En termes de répartition, la Petite Pervenche est commune dans les forêts d’Europe, pouvant s’élever jusqu’à 1 300 m d’altitude et se retrouve jusqu’au sud de la Russie.

Concernant son habitat, elle favorise les sous-bois, haies et parcs, et peut se montrer envahissante. En zone européenne tempérée, elle sert de bio-indicateur, signalant l’utilisation historique humaine des terrains.

D’un point de vue utilitaire, elle possède des propriétés astringentes, diurétiques, dépuratives, toniques et vulnéraires. On utilise cette substance pour traiter les troubles de la mémoire, les symptômes de la maladie de Raynaud, l’ischémie cérébrale et les troubles liés à l’artériosclérose. On envisage son potentiel anti-cancéreux. Les feuilles peuvent servir pour des infusions.

La vincamine

La vincamine, un spasmolytique aux propriétés vasodilatatrices périphériques, est efficace pour améliorer l’irrigation et l’oxygénation cérébrale. Elle est utilisée comme anti-ischémique dans les affections cérébro-vasculaires, notamment celles liées à la sénescence. Son utilisation s’étend aux séquelles de traumatisme crânien, aux troubles cochléo-vestibulaires et aux troubles rétiniens d’origine ischémique.

Ce vasodilatateur périphérique est un alcaloïde monoterpenoïde indolique présent dans les feuilles de Vinca minor (petite pervenche), représentant environ 25 à 65 % de ses alcaloïdes indoliques. Il peut aussi être synthétisé à partir d’alcaloïdes apparentés.

En Europe, les professionnels de santé prescrivent la vincamine pour traiter la démence dégénérative primaire et vasculaire. Aux États-Unis, elle bénéficie d’une autorisation en tant que complément alimentaire, limitée à une utilisation chez l’adulte pour une durée de six mois maximum. Les formes pharmaceutiques les plus courantes sont les comprimés à libération prolongée.

Chimiquement, le tabersonine sert à la semi-synthèse de la vincamine. Le vinpocétine, un dérivé synthétique de la vincamine, s’utilise dans le traitement des maladies cérébrovasculaires et comme complément alimentaire. D’autres dérivés de la vincamine ont fait l’objet d’études en tant qu’agents anti-addictifs et antidiabétiques.

Du point de vue de la recherche, la vincamine pourrait présenter des effets nootropiques et a été explorée comme potentiel médicament anticancéreux. Néanmoins, son utilisation à long terme soulève des préoccupations, documentées par le Programme National de Toxicologie des États-Unis.

La strychnine

La strychnine, un alcaloïde extrait de la noix vomique de l’arbre Strychnos nux-vomica, est notoirement connue pour sa forte toxicité. Elle agit comme un excitant du système nerveux central, au niveau médullaire et bulbaire. À très faibles doses, elle sert de tonique nerveux et stimulant de la digestion, utilisée en tant qu’antiasthénique. Cependant, à des doses plus élevées, la strychnine provoque des convulsions mortelles.

En pharmacie, les professionnels ont exploité la strychnine à très faible concentration pour ses propriétés stimulantes. Autrefois, son utilisation s’étendait à la lutte contre les corbeaux et les petits rongeurs. Cependant, en France, on a interdit son emploi dans la médecine humaine depuis 1982. De même, elle ne se vend plus comme raticide depuis 1999.

Physiquement et chimiquement, Pierre Joseph Pelletier et Joseph Caventou, pharmaciens français, ont isolé la strychnine en 1818. Elle se manifeste sous la forme de cristaux rhomboïdaux incolores et inodores, mais au goût amère très prononcé. La structure chimique complexe de la strychnine a été élucidée grâce à l’expertise de Sir Robert Robinson et Robert Woodward, récompensés par le prix Nobel de chimie.

En ce qui concerne ses effets sur l’être humain, la strychnine stimule le système nerveux central. À doses moyennes, elle augmente l’amplitude respiratoire, mais à dose létale, elle entraîne des spasmes musculaires, des douleurs intenses, des convulsions, un arrêt cardiaque, et finalement la mort par asphyxie. On considère les barbituriques comme les meilleurs antidotes.

On a également utilisé la strychnine dans des cas de dopage dans le sport, notamment en athlétisme et en haltérophilie. Elle a aussi marqué l’histoire par son utilisation dans des suicides et assassinats, comme ceux de l’empoisonneur de Lambeth, du guitariste Robert Johnson, du bandit Gaspare Pisciotta, et du neurochirurgien Thierry de Martel.

La noix vomique est toujours très utilisée en homéopathie sous le nom de la souche Boiron Nux vomica par exemple, conseillé pour les troubles digestifs et les troubles du comportement principalement.

Les alcaloïdes quinoléiques

Les alcaloïdes quinoléiques représentent une proportion significative (2 à 15%, parfois jusqu’à 20%) des substances actives dans certaines drogues. Ces alcaloïdes se caractérisent par une structure moléculaire spécifique, liant un noyau quinoléique à un noyau quinuclidique via une fonction alcool secondaire. Ce dernier possède une chaîne latérale vinylée.

Parmi ces alcaloïdes quinoléiques, on trouve la cupréine, qui est essentiellement de la quinine dépourvue de groupes méthyles. En outre, les hydrobases comme l’hydroquinine et l’hydroquinidine font également partie de cette catégorie d’alcaloïdes. Ces composés ont des structures et des propriétés chimiques distinctes, définies par la modification de leurs groupes fonctionnels et de leurs noyaux de base.

Le quinquina rouge

Le quinquina rouge (Cinchona pubescens), un petit arbre sempervirent de la famille des Rubiacées, est originaire de la Cordillère des Andes et d’Amérique centrale. Sa particularité réside dans son écorce, riche en quinine. Il est également connu sous divers noms régionaux en Amérique du Sud, notamment comme Kina, el quino, quinina roja.

Ce petit arbre peut atteindre 10 m de hauteur, avec un tronc de 20 cm de diamètre. Ses feuilles décussées, elliptiques ou ovales à suborbiculaires, mesurent entre 8-23 × 5-21 cm. Les inflorescences se présentent sous forme de cymes terminales, avec des fleurs à corolle rose à pourpre.

La distribution et l’écologie du quinquina rouge sont notables pour sa large répartition, s’étendant du Costa Rica au nord-est du Venezuela, le long de la Cordillère des Andes jusqu’en Bolivie centrale. Il pousse entre 600 et 3 300 mètres d’altitude et a fait l’objet de cultures en Amérique du Sud, en Afrique et en Asie. Cependant, on le juge envahissant dans les îles Galápagos, à Hawaï et en Polynésie française.

En termes de composition, l’écorce de Cinchona pubescens est riche en alcaloïdes quinoléiques, dont la quinine, la cinchonidine et la cinchonine. Elle contient également des composés phénoliques, des acides organiques, des saponosides et de l’huile essentielle.

L’ethnopharmacologie indique que le quinquina rouge a été utilisé comme antipaludique, tonifiant et antipyrétique dans diverses cultures. Historiquement, l’écorce de quinquina a joué un rôle important dans l’approvisionnement européen en quinine, essentielle pour traiter le paludisme. Sa culture a évolué de la cueillette sauvage en Amérique du Sud à des plantations intensives en Indonésie et en Afrique, influençant significativement l’histoire coloniale et pharmaceutique.

La quinine

La quinine est un alcaloïde naturel aux propriétés multiples, principalement connu pour son action contre le paludisme. Elle est efficace contre le Plasmodium, l’agent responsable de cette maladie, en agissant sur sa forme asexuée. Utilisable à titre préventif ou curatif, la quinine peut être toxique à doses élevées, entraînant divers effets secondaires.

Elle a une action antipyrétique notable, en agissant sur les centres nerveux thermorégulateurs, particulièrement efficace lors des fièvres paludéennes. Sur le système cardiovasculaire, la quinine peut provoquer une hypotension par vasodilatation à des doses élevées.

Actuellement, son utilisation principale est dans le traitement du paludisme, en particulier dans les cas résistants aux autres antipaludiques. Historiquement, extraite du quinquina, un arbuste d’Amérique du Sud, elle était utilisée avant l’avènement de ses dérivés comme la quinacrine, la chloroquine et la primaquine.

La découverte de la quinine par les Européens remonte au XVIIe siècle. Le quinquina rouge et le quinquina jaune sont les espèces ayant des propriétés antipaludiques. La méthode de Pelletier-Caventou en 1820 a permis l’extraction des principes actifs de l’écorce de quinquina, ouvrant la voie à l’usage médical de la quinine.

La quinine agit en inhibant la protéase du Plasmodium et en empêchant la polymérisation de l’hème de l’hémoglobine. Cependant, sa toxicité pour le système nerveux a conduit à la recherche de dérivés moins toxiques comme la chloroquine et la méfloquine, ainsi que l’artémisinine, un composé non apparenté à la quinine, très actif contre des formes de paludismes résistants.

Les effets secondaires de la quinine incluent une thrombopénie et une microangiopathie thrombotique. Elle est aussi utilisée dans le traitement des crampes musculaires, bien que sa faible efficacité et les risques potentiels aient conduit à une restriction de son usage.

Enfin, la quinine est un composant aromatique de l’eau tonique et de certaines boissons gazeuses, lui donnant un goût amer caractéristique. La quinine figure sur la liste des médicaments essentiels de l’Organisation mondiale de la santé.

La quinidine

La quinidine est une substance antiarythmique efficace pour réduire les fonctions myocardiques, en diminuant l’excitabilité et la conductibilité du myocarde. Elle s’utilise principalement comme sédatif cardiaque pour traiter les extrasystoles et prévenir les tachycardies supraventriculaires.

Bien qu’elle détienne des propriétés antipaludiques, son utilisation pour cette indication n’est pas recommandée en raison de ses effets cardiaques. Sa toxicité, supérieure à celle de la quinine, peut provoquer des troubles liés au cinchonisme. En tant que stéréoisomère de la quinine, elle provient de l’écorce de quinquina.

La quinidine, classée dans les antiarythmiques de classe I, agit en bloquant principalement le courant rapide d’entrée du sodium (INa) dans les cellules cardiaques, phénomène connu sous le nom de bloc dépendant de l’usage.

Henry fils et A. Delondre ont découvert la quinidine en 1833, aujourd’hui majoritairement produite par hémisynthèse à partir de la quinine. Considérée comme l’antiarythmique le plus ancien, elle appartient à la classe Ia des stabilisants de membrane.

Sa fonction historique dans la prévention de la récidive de la fibrillation auriculaire a cédé sa place aux antiarythmiques de classe IC, tels que le Flécaïnide, la cibenzoline et la propafénone.

Cependant, elle retrouve une utilité dans le traitement de certains troubles du rythme cardiaque, notamment dans le syndrome de Brugada, la réduction de l’induction de troubles du rythme ventriculaire, et les troubles rythmiques liés à une repolarisation précoce ou un syndrome du QT court.

Ses effets secondaires incluent le prolongement de l’intervalle QT sur l’électrocardiogramme, avec un risque accru de torsades de pointe, surtout en cas de bradycardie ou d’hypokaliémie.

Bien que la production de quinidine par AstraZeneca ait cessé en 2006, d’autres laboratoires, dont Sanofi en France, continuent sa synthèse, malgré une pénurie dans certains pays.

Les alcaloïdes imidazoliques

On considère parfois l’imidazole comme un alcaloïde. Ce terme désigne aussi un groupe de composés intégrant un cycle imidazole dans leur structure moléculaire. L’imidazole se manifeste sous forme de solide cristallin de couleur blanche à brun clair, émettant une odeur douce et agréable. Il est soluble dans l’eau et divers solvants organiques polaires.

Dans le domaine pharmaceutique, la structure de nombreux médicaments intègre l’anneau imidazole, notamment dans les agents antifongiques tels que l’éconazole, le miconazole et le sulconazole. Ces applications soulignent l’importance de l’imidazole dans le développement de traitements médicaux.

Le Jaborandi

Le Pilocarpus pennatifolius, membre de la famille des Rutaceae, pousse en Amérique du Sud, notamment au Paraguay, en Argentine et au Brésil. On le cultive également en Afrique. Cet arbuste perennifolio ou petit arbre peut atteindre une hauteur de 2 à 5 mètres. Il se caractérise par des feuilles coriaces et alternes, avec jusqu’à 57 foliolos. Les fleurs, mesurant environ 1 cm de diamètre, forment des inflorescences rouge parduzco de 30 cm de long, émettant une odeur agrie.

La plante jouit d’une réputation pour ses propriétés diurétiques et diaforétiques. Elle contient de la pilocarpine, un alcaloïde qui agit sur la contraction pupillaire. Elle augmente la salivation et stimule le péristaltisme intestinal. On l’utilise principalement pour extraire la pilocarpine, un ingrédient essentiel dans les traitements ophtalmiques du glaucome.

Le jaborandi peut croître jusqu’à 3 mètres, avec une écorce lisse gris-pourpre. Ses feuilles sont grandes et alternes, divisées en 3 à 7 petites folioles. Ses fleurs hermaphrodites, de couleur rouge brun à pourpre, se regroupent en grappes fournies.

La pilocarpine est appréciée en médecine pour son influence sur l’activité parasympathomimétique, stimulant le système nerveux autonome parasympathique. Elle régule la transpiration excessive et facilite la digestion, et est efficace contre la sécheresse oculaire et la bouche sèche, symptômes du syndrome de Sjögren.

En homéopathie, le jaborandi est disponible sous forme de comprimés, gouttes et ampoules buvables. Ses effets secondaires peuvent engendrer des irritations gastriques et des nausées. La consommation de ce produit se déconseille en présence de problèmes cardiaques ou circulatoires. Toutefois, un usage conforme aux prescriptions médicales le rend sûr.

La pilocarpine

La pilocarpine est un alcaloïde extrait des feuilles de jaborandi (Pilocarpus pennatifolius Lemaire ou Pilocarpus microphyllus), appartenant à la famille des rutacées. Elle a une action parasympathomimétique notable, agissant directement sur les récepteurs muscariniques, en particulier les récepteurs M3.

La pilocarpine provoque ophtalmiquement un myosis et une réduction de la pression intraoculaire, principalement utilisée dans le traitement du glaucome. Commercialisée sous diverses formes, elle se trouve notamment en collyres. Parmi eux, on trouve ISOPTO-PILOCARPINE et PILO. Elle s’intègre aussi dans des médicaments anti-glaucomateux. Ces médicaments sont combinés à des β-bloquants. Par exemple, le PILOBLOQ (associé au timolol) et le CARPILO (associé au cartéolol).

Administrée par voie orale, le SALAGEN (contenant 5 mg de pilocarpine) cible l’hyposialie (manque de salivation). Ce médicament est indiqué pour traiter la xérostomie iatrogène suite à une radiothérapie et dans le cadre du Syndrome de Gougerot-SjögrenElle sert aussi dans le traitement des lithiases salivaires mineures.

Parmi les effets secondaires, la pilocarpine peut induire une hypersécrétion lacrymale, salivaire et gastrique, ainsi qu’une incontinence urinaire et fécale, et des troubles gastro-digestifs tels que l’hyperacidité et l’augmentation du péristaltisme.

La molécule de pilocarpine se présente sous forme d’aiguilles incolores, inodores et de saveur amère. Elle est très soluble dans l’eau et l’alcool, mais insoluble dans l’éther et faiblement soluble dans le chloroforme. Certains collyres contenant de la pilocarpine sont disponibles en vente libre.

Une étude clinique en double aveugle a démontré l’efficacité et la sécurité de la pilocarpine chez des patients souffrant de xérostomie post-radiothérapie. À la dose de 15 mg par jour, elle réduit ou élimine la sécheresse buccale et la difficulté à parler.

La pilocarpine figure sur la liste des médicaments essentiels de l’Organisation mondiale de la santé.

Les bases puriques

Les bases puriques telles que la caféine, la théine (théier) ou encore la théobromine (cacaoyer), figurent parmi les alcaloïdes. Pourtant leur origine biosynthétique est différente et ces composés ne font donc pas partie de la classe des alcaloïdes malgré certaines analogies.

Hors du cadre médical, l’utilisation inappropriée de substances contenant des alcaloïdes avec des dosages non adaptés peut entraîner la mort. Il est impératif de ne jamais recourir à l’automédication avec des plantes à alcaloïdes. Seul un médecin peut les prescrire, dans un contexte de surveillance médicale stricte.

Caféine

La caféine, connue aussi sous le nom de théine ou 1,3,7-triméthylxanthine, appartient à la famille des méthylxanthines. Cette molécule agit en tant que stimulant psychotrope et diurétique léger, et est présente dans divers aliments. La caféine interagit avec d’autres molécules alcaloïdes, telles que la nicotine. Elle se fixe sur les récepteurs nicotiniques de l’acétylcholine. Cela induit un sentiment de bien-être et augmente la vigilance.

Le chimiste allemand Friedlieb Ferdinand Runge l’a découverte en 1819. Il l’a nommée « Kaffein » en raison de sa présence dans le café. On la trouve dans les graines, les feuilles et les fruits de certaines plantes. Elle agit comme un insecticide naturel. Chez les mammifères, elle stimule principalement le système nerveux central et cardiovasculaire. Elle réduit la somnolence et augmente l’attention.

Considérée comme la substance psychoactive la plus consommée au monde, la caféine est légale dans tous les pays. Son profil psychotrope analeptique stimulant a été défini par électroencéphalographie après administration orale. Elle entraîne des effets tels que tachycardie et stimulation mentale, suivi d’insomnie.

Pharmacocinétiquement, la caféine s’absorbe rapidement par le tube digestif et atteint rapidement le cerveau en quelques minutes. Elle traverse facilement la barrière hémato-encéphalique, agissant en tant qu’antagoniste des récepteurs à adénosine, et subit principalement un métabolisme hépatique presque complet.

Elle augmente l’activité nerveuse avec la libération d’adrénaline et l’augmentation des niveaux de dopamine. La caféine est également un inhibiteur compétitif de l’enzyme AMPc-Phosphodiestérase, ce qui intensifie et prolonge les effets de l’adrénaline.

Les effets secondaires incluent hypersécrétion lacrymale, salivaire, gastrique, incontinence urinaire et troubles gastro-digestifs. Il convient de surveiller la consommation de caféine, en particulier chez les individus sensibles ou ceux souffrant de troubles cardiaques ou circulatoires.

La caféine est répertoriée par l’Organisation mondiale de la santé parmi les médicaments essentiels. Elle trouve une utilisation tant à des fins récréatives que médicales, notamment pour lutter contre la fatigue et rétablir la vigilance.

Théine

Isolée dans le thé par Alphonse Oudry en 1827, la caféine, aussi appelée théine ou 1,3,7-triméthylxanthine, est un alcaloïde de la famille des méthylxanthines. Bien que nommée initialement théine, elle a été identifiée en 1838 comme étant identique à la caféine, terme encore utilisé couramment. La caféine représente la principale méthylxanthine dans le thé, avec une présence moindre de théophylline et de théobromine.

Contrairement à une croyance répandue, les effets excitants du thé ne se distinguent pas significativement de ceux du café. Néanmoins, le thé contient en général moins de caféine qu’une tasse de café. Il y a environ 80 mg dans le thé contre 100 à 120 mg dans le café. Une infusion prolongée du thé libère plus de tanins. Ainsi, cela module les effets de la caféine et réduit son effet excitant.

Les polyphénols oxydés (tanins) dans le thé tempèrent l’effet de la théine. Ils assurent une libération uniforme de l’effet sur 6 à 8 heures.  En revanche, la caféine du café se libère rapidement, produisant un effet plus intense sur 2 à 3 heures. Les théarubigines, un autre type de tanins, atténuent l’effet de la caféine sur l’organisme. Pour obtenir un effet stimulant maximal, il convient d’infuser le thé moins de deux minutes.

La théanine, un acide aminé présent dans le thé, exerce un effet relaxant, contrebalançant les effets de la théine. Le thé contient également plusieurs vitamines (C, A, B1, B2, B6, B9, E, K) bénéfiques pour l’organisme.

On perçoit les thés japonais, plus riches en vitamine C, comme plus stimulants que les thés chinois ou indiens. La teneur en théine d’un thé dépend de la partie de la plante utilisée et des conditions de culture et de traitement.

Les thés avec une faible teneur en théine incluent ceux récoltés des parties basses du théier et les tiges, ainsi que certains thés verts japonais (Hojicha, Kukicha) et les oolongs très oxydés. Les thés parfumés, composés majoritairement de feuilles basses, présentent également une faible teneur en théine.

Théobromine

La théobromine (C7H8N4O2), un composé amer de la famille des méthylxanthines qui inclut aussi la caféine et la théophylline, ne contient pas de brome malgré son nom. Ce terme, dérivé du genre du cacaoyer Theobroma (« nourriture des dieux » en grec), s’ajoute au suffixe « -ine », caractéristique des alcaloïdes.

On trouve la théobromine principalement dans le chocolat, le guarana et les feuilles de yerba maté. Sa concentration varie significativement entre les graines de cacaoyer (1-3 %), le maté (0,45-0,9 %) et le guarana (0,02 à 0,06 %).

Dans le chocolat, sa concentration est suffisamment faible pour ne pas présenter de danger pour l’humain, même en grande quantité. En médecine, on utilise la théobromine comme diurétique, vasodilatateur et cardiostimulant, avec un effet moins prononcé que celui de la caféine. Des études ont révélé son potentiel antitussif, comparable ou supérieur à celui de la codéine. Elle provoque des mutations génétiques sur certains organismes et on la suspecte d’augmenter le risque de cancer de la prostate. Comme tératogène expérimental, elle a montré une réduction du poids fœtal chez le lapin, mais aucun défaut de développement associé chez le rat. Un autre effet notable est l’aggravation des reflux acides gastro-œsophagiens.

Les chiens sont particulièrement vulnérables à l’empoisonnement par la théobromine, avec une dose létale variant de 90 à 250 mg/kg. Bien que moins susceptibles, les chats et chevaux peuvent également être affectés.

La théobromine, isolée pour la première fois en 1878, se présente sous forme de solide blanc à température ambiante. Bien qu’elle ressemble à la caféine, son impact sur le système nerveux central est moindre. On la reconnaît pour induire une dépendance au chocolat. La théobromine n’a pas d’antidote connu. Elle peut provoquer des symptômes d’intoxication chez les animaux, y compris l’excitation. Dans les cas graves, elle peut entraîner des convulsions ou la mort.

Sources bibliographiques médicales et essais cliniques

  • Bruneton J. Pharmacognosie, Phytochimie, Plantes médicinales. Ed. Tec et Doc 1997
  • Morel J-M. Traité pratique de Phytothérapie. Ed. Grancher 2008
  • R.R.Paris, H. Moyse. Matière médicale, Coll. Précis de pharmacie, Masson
  • Pharmacopée Française 10e édition
  • Roberts, M. F. Wink, and M. , Alkaloids -Biochemistry, Ecology, and Medicinal Applications, Book Reviews Phytochemistry 1999
  • Tanot, in Le Beau (P.) et Janot, Traité de Pharmacie chimique, IV, Paris 1955-1956

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