Huile essentielle de Romarin à Camphre, symbole de mort et d’amour

Le romarin à camphre, de son nom botanique Rosmarinus officinalis camphoriferum, appartient à la famille des Lamiaceae. Son huile essentielle est obtenue à partir des rameaux fleuris.

Histoire du Romarin

Symbole d’amour, de mariage et de mort, le romarin ancien appartient aux rituels religieux. Il est entré dans la thérapeutique avec la médecine arabe au Xe siècle. Le romarin est une plante typique du bassin méditerranéen, cultivée et utilisée depuis longtemps. Ses applications sont multiples : aromathérapie, phytothérapie, parfumerie, cuisine, etc.

Dans l’Antiquité

Il semblerait que le romarin ait eu une valeur symbolique très tôt dans l’Antiquité. « Plante aromatique devenue funéraire, son arôme passait pour conserver le corps du trépassé, et son feuillage toujours vert semblait un gage d’immortalité ». Associé à un certain nombre de rites funéraires, il permettait d’accompagner le défunt dans l’au-delà. Mais il avait aussi une utilité pour les vivants lors de ces rites, puisqu’on sait que les Romains portaient des couronnes de romarin (d’où son surnom d’herbe à la couronne, coronarius) pour, très certainement, les aider à garder la tête froide lors de tels événements.

Symbole de l’amour, du mariage et de la mort, le romarin de l’Antiquité appartenait aux cérémonies religieuses.

Romarin et symbolique

Si on a retrouvé des rameaux de romarin dans des tombes remontant aux toutes premières dynasties égyptiennes, rien n’atteste qu’il avait une telle fonction. Peut-être avait-il en Égypte la même attribution qu’en Grèce antique et en Rome impériale. Des sources indiquent que Grecs et Romains employaient la plante comme médecine, mais rien n’est moins certain.

Il semblerait que le romarin ait eu une valeur symbolique très tôt dans l’Antiquité. « Plante aromatique devenue funéraire, son arôme passait pour conserver le corps du trépassé, et son feuillage toujours vert semblait un gage d’immortalité ». Associé à un certain nombre de rites funéraires, il permettait d’accompagner le défunt dans l’au-delà. Mais il avait aussi une utilité pour les vivants lors de ces rites, puisqu’on sait que les Romains portaient des couronnes de romarin (d’où son surnom d’herbe à la couronne, coronarius) pour, très certainement, les aider à garder la tête froide lors de tels événements.

Symbole de mort, il est aussi symbole de vie et d’amour. Aussi l’employait-on couramment, toujours sous forme de couronne, lors des mariages. Du culte des morts on glisse vers l’idée du rajeunissement et de la résurrection. Mais le romarin, de plante cultuelle, est passé au stade médicinal puis condimentaire, à travers un processus de désacralisation, comme on en rencontre tant dès qu’on parle des plantes. « Mais cette injuste déchéance ne pouvait être elle-même que toute provisoire, puisque, après tout, les légendes concernant les plantes n’étaient qu’une manière d’en souligner les vertus. Nous pourrions dire aujourd’hui qu’elles étaient destinées à engendrer un conditionnement psychique préalable qui rendent plus efficaces encore leurs très réelles propriétés ».

C’est cela aussi la magie, qui autorise à ce qu’un remède marche plus ou moins bien, en fonction de l’attitude qu’on observe vis-à-vis de lui. Par exemple, il ne suffisait pas aux étudiants grecs de se tresser des couronnes de romarin pour que cela favorise immédiatement leur intellect (de même qu’on le ferait avec un diffuseur d’huiles essentielles aujourd’hui). Il faut retrouver le caractère sacré de la plante que des siècles et des siècles de dénégation et d’ignorance ont effacé.

Quelques anecdotes médiévales :

La distillation sépare le fin de l’épais et retrouve « l’esprit de la plante ». C’est ce qu’ Archigène a tenté au Ier siècle de notre ère, par décoction. Plus tard, on raconte que les Arabes furent les premiers à distiller le romarin. Quoi qu’il en soit, il fit obtenu une huile essentielle très appréciée par les spagyristes et les apothicaires de la Renaissance. En dehors de son aire géographique d’origine, le romarin était en outre largement cultivé dans les jardins médiévaux.

Enfin, la Renaissance accueille le romarin. Il sera par ailleurs admiré du XVIe au XVIIIe siècle et sera présent dans le vinaigre des Quatre Voleurs. Mais surtout, le romarin a fait la une des journaux au XVIIe siècle, principalement à travers les eaux pour lesquelles la reine de Hongrie était très célèbre. Cette eau, qui est en fait un alcoolat, contient des fleurs de romarin distillées et fermentées avec du miel, et éventuellement de la térébenthine et du bois de cèdre.

Il entre en thérapeutique au Xe siècle avec la médecine arabe, doté d’indications rapportées par Ibn al-Baytar (XIIIe siècle) : « le romarin provoque l’écoulement de l’urine et des règles, résout les obtructions du foie et de la rate, il purifie les poumons, il est utile dans la toux, l’asthme, l’ascite et l’hydropisie (rétention d’eau) ». Les premières distillations effectuées à Montpellier datent du XIVe siècle. En massage, l’huile de type camphrée est réputée contre les douleurs musculaires et celle de type cinéole désinfectante et expectorante.

La distillation participe à cela, elle permet de séparer le subtil de l’épais et de retrouver « l’esprit de la plante ». C’est ce que tente Archigène au Ier siècle ap. J.C., en procédant par décoction. Plus tard, il est dit que ce sont les Arabes qui, les premiers, ont distillé le romarin. Si l’on est certain que cela s’est produit au XIV ème siècle, les sources sont discordantes quant à l’identité de ceux qui ont officié la manœuvre : s’agit-il des Arabes ou bien de Ramon Lull. 

Quoi qu’il en soit, sera obtenue une huile essentielle tenue en très haute estime par les spagyristes et les apothicaires de la Renaissance, mais, avant d’y parvenir, quelques anecdotes médiévales propres au romarin : En dehors de son aire géographique d’origine, le romarin est très cultivé dans les jardins médiévaux. En effet, il est mentionné dans le Capitulaire de Villis (le territoire de l’empire carolingien s’étendant bien au-delà du seul pourtour méditerranéen), mais aussi sur le plan de Saint-Gall, en Suisse ! Enfin, Hildegarde en parle un peu et le Grand Albert mentionne une recette à base de lavande, de menthe pouliot, de marjolaine et de romarin déjà présentée comme « eau de jouvence ».

Populaire, le romarin n’était pas réservé qu’à l’élite. Il fait partie de la pharmacopée traditionnelle de nombreux pays méridionaux. Mais il est vrai que si la sagesse populaire a parfois du bon, le romarin, cultivé, étudié et utilisé dans les monastères, sera peu à peu entré dans le domaine du religieux chrétien. En tant que simple, c’est particulièrement au Moyen-Âge qu’on lui a reconnu certaines de ses propriétés médicinales (faciliter la mémoire dont il est l’un des symboles, lutter contre les rhumatismes…). Autant de propriétés qui s’illustrent à travers d’innombrables préparations au cours des siècles (eau de Dardel, baume Nerval, baume tranquille, alcoolat vulnéraire du Codex, baume nervin, onguent de romarin…).

De la Renaissance à nos jours

Louis XIV en fit l’usage pour, lui aussi, soulager ses rhumatismes, alors que Madame de Sévigné en faisait l’apologie à sa fille, Madame de Grignan. En 1678, Madame Fouquet reviendra sur le cas de la reine de Hongrie dans son Recueil des remèdes faciles et domestiques. Elle y écrit que cette reine se lavait le visage de cet élixir, ce qui aurait eu pour effet de la rendre plus belle…

Au XVI ème siècle, Jean Bauhin mentionne ce que l’on appelle les herbes de la madone, c’est-à-dire celles dédiées à la vierge Marie. Parmi elles, on trouve le romarin « qui doit sans doute son nom à une équivoque entre marinus et marianus, ou encore à une certaine analogie de son feuillage avec celui du genévrier qui servit à cacher la vierge fugitive ».

En latin, le nom scientifique du romarin est bien rosmarinus, non rosmarianus. Le romarin n’appartient donc pas à Marie, même si on en a fait son « arbre », mais davantage aux côtes marines. Il a été dit que le mot rosmarinus se décompose comme suit : ros-marinusros pouvant signifier autant « rose » que « rosée », le romarin serait donc une « rose marine » ou une « rosée marine » (l’anglais rosemary et surtout l’allemand rosmarin ne font pas de doute à ce sujet).

Paul-Victor Fournier, homme d’église, nous indique que ros est un vieux mot latin apparenté à rhus qui veut dire… buisson. Étymologiquement, le romarin n’est donc pas autre chose qu’un arbrisseau maritime. Ce qui est, du reste, une banale évidence.

Au XXe siècle, Leclerc a rapporté que le romarin était également un stimulant recommandé dans les asthénies causées par des maladies infectieuses. En macération dans du vin chaud en cataplasme contre les articulations enflées, les entorses ainsi que les contusions. L’infusion est donc bénéfique comme bain de bouche pour l’amygdalite.

Autrefois, une boisson digestive était préparée en faisant tremper du romarin dans une bouteille de vin rouge. En infusion, le romarin est conseillé lors des périodes d’insuffisance biliaire, de difficultés digestives, de maux de ventre, de fatigue (par exemple après une maladie) ou d’infections respiratoires. La thérapie au romarin est de fait depuis longtemps populaire au printemps pour se désintoxiquer. Le romarin est recommandé par voie topique pour aider à cicatriser les plaies et soulager les douleurs musculaires et articulaires.

Si Valnet force un peu le roman avec de l’eau de rose, il n’en reste pas moins vrai que cet élixir eut le mérite de soigner cette reine des rhumatismes dont elle était affligée, et qu’il lui aurait apporté une seconde jeunesse dans son grand âge. Ce n’était peut-être pas une reine de Hongrie, peut-être que cela ne se déroulait pas au XIV ème siècle, cependant, au XVII ème siècle, cette eau est le nec plus ultra dont les grands de ce monde ne surent se passer.

Quelles sont les propriétés pharmacologiques de l’huile essentielle de Romarin ct Camphre ?

Quelles sont ses propriétés ?

  • Action neuromusculaire, relaxante, décontractante
  • Tonicardiaque et hypotensive
  • Décongestionnante veineuse
  • Antalgique et anti-inflammatoire
  • Anticatarrhale et expectorante
  • Mucolytique
  • Lipolytique
  • Urolytique antalgique
  • Emménagogue non hormonale
  • Antalgique externe, anti-inflammatoire
  • Régulatrice hépatique, comme tous les romarins, bien que beaucoup moins spécifique que Rosmarinus ct acétate de bornyle, verbénone
  • Cholérétique et cholagogue
  • Cortison-like
  • Lymphotonique et décongestionnante
  • Antioxydante par effet protecteur de l’ADN contre les lésions induites par le peroxyde d’hydrogène (H2O2)

Comment le Romarin agit-il ?

Les effets du romarin sur les maux de ventre et les digestions difficiles seraient dus aux flavonoïdes et aux essences. Son action anti-inflammatoire et antiseptique pourrait être liée à la présence d’acides phénoliques.

Quelques autres plantes utilisées contre les troubles digestifs
La phytothérapie traditionnelle utilise également les plantes suivantes pour faciliter la digestion :

L’huile essentielle de Romarin ct Camphre requiert-elle des précautions d’emploi ?

Précautions d’emplois

  • Risque de neurotoxicité à haute dose (peut induire convulsions, nausées et vomissements)
  • Contre-indiquée chez les personnes épileptiques ou aux antécédents de convulsions
  • Hypertensive à dose moyenne
  • Ne pas diffuser, ni inhaler, ni mettre dans l’eau du bain
  • Ne pas avaler ! L’ESCOP déconseille l’utilisation de cette huile essentielle par voie orale
  • Interdite en usage interne
  • Usage cutané seul préconisé
  • Contre-indiquée chez la femme enceinte (abortive) ou allaitante
  • Éviter en association avec la cortisone, risque d’interaction médicamenteuse
  • Ne pas utiliser sur une période prolongée, au risque de mettre au repos l’axe hypophyso-surrénalien et de subir une insuffisance surrénalienne aiguë à l’arrêt de la prise de l’H.E
  • Éviter d’appliquer l’huile essentielle le soir (ou avant toute période de repos)
  • Déconseillée chez les personnes souffrant d’ostéoporose, en raison du risque de décalcification inhérent
  • Dermocaustique ; action révulsive sur la peau à l’état pur et agressif pour les muqueuses (rougeurs, irritations, prurit)
  • Inhibitrice enzymatique, risque d’interactions médicamenteuses, demandez conseil à votre pharmacien
  • Contre-indiquée chez les asthmatiques
  • Réservée à l’adulte ! L’EMA réserve l’usage de l’huile essentielle de romarin aux personnes de plus de 18 ans
  • Prudence chez les personnes atteintes de maladies auto-immunes, âgées ou atteintes de parkinson, ainsi qu’aux personnes neurosensibles
  • Interactions médicamenteuses avec les huiles essentielles contenant des sesquiterpènes à plus de 10 %

Formes et dosages du Romarin :

Les infusions de romarin se font avec 2 à 4 g de feuilles séchées dans une tasse d’eau bouillante pendant dix minutes, trois fois par jour. En application locale, il est possible d’utiliser cette infusion sur la zone à traiter, ou de préparer un bain (35 à 38°C, 10 à 20 minutes) en y ajoutant une décoction de 50 g de feuilles de romarin dans un litre d’eau bouillante.

Il existe trois types d’huile essentielle de romarin selon l’essence qui y prédomine : camphre, cinéole ou verbénone.

Ce qu’en pensent les autorités de santé :

L’EMA

L’Agence européenne du médicament considère comme « traditionnel » l’usage des feuilles et de l’huile essentielle de romarin « par voie orale, dans le traitement des digestions difficiles et des maux de ventre peu intenses » et « en application locale, en traitement complémentaire des douleurs musculaires et articulaires mineures ». L’Agence recommande une durée de traitement maximale de deux semaines (voie orale) ou de quatre semaines (application locale).

LA COMMISSION E

La Commission E du ministère de la Santé allemand reconnaît l’usage des feuilles et de l’huile essentielle de romarin dans le traitement « des problèmes digestifs (voie orale), ainsi que des douleurs rhumatismales et des problèmes de circulation sanguine périphérique (en application locale) ».

L’ESCOP

La Coordination scientifique européenne en phytothérapie reconnaît l’usage des feuilles de romarin « pour améliorer les fonctions biliaires et hépatiques et soulager les troubles digestifs (voie orale), pour soulager les douleurs rhumatismales et les problèmes de circulation sanguine périphérique (application locale), et pour traiter les plaies mineures (application locale) ». L’ESCOP déconseille l’usage de l’huile essentielle de romarin par voie orale.

Sources bibliographiques médicales et essais cliniques :

  • Melo GA, Grespan R, Fonseca JP, Farinha TO, Silva EL, Romero AL, Bersani-Amado CA, Cuman RK. Rosmarinus officinalis L. Essential Oil Inhibits In Vivo and In Vitro Leukocyte Migration. J Med Food Car. 2011
  • Takaki I, Bersani-Amado LE, Vendruscolo A, Sartoretto SM, Diniz SP, Bersani-Amado CA, Cuman RK. Anti-inflammatory and antinociceptive effects of Rosmarinus officinalis L. essential oil in experimental animal models. J Med Food. 2008
  • Jirovetz L, Buchbauer G, Denkova Z et all. Antimicrobial testings and gas car chromatographic analysis of pure oxygenated monoterpenes 1,8-cineol, alpha-terpineol, terpinene-4-ol and camphor as well as target compounds in essential oils of pine (Pinus pinaster), rosemary (Rosmarinus officinalis), and tea-tree (Melaleuca alternifolia). Sci Pharm.2005
  • Luqman S, Dwivedi GR, Darokar MP, Kalra A, Khanuja SP. Potential of rosemary oil to be used in drug-resistant infections. Altern Ther Health Med. 2007
  • Sagorchev P, Lukanov J, Beer AM. Investigations into the specific effects of rosemary car oil at the receptor level. Phytomedicine. 2010

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