L’Eschscholtzia, la petite Opium amérindienne de Californie

Également appelé Pavot de Californie, l’eschscholtzia était traditionnellement utilisé par les amérindiens pour l’usage médicinal du latex de la plante comme analgésique dans les maux de dents. Ils l’employaient également pour soigner les maux de tête, les coliques ou pour aider les enfants à s’endormir.

Un peu d’histoire

Le noms de la plante a été choisi en 1820 par le poète romantique allemand et explorateur Von Chamisso, en l’honneur de son ami botaniste et naturaliste germano-batle de nationalité russe Johann Friedrich von Eschscholtz, l’un des premiers scientifiques à étudier le Pacifique, notamment l’Alaska et la Californie.

Durant l’expédition scientifique, dirigée par Otto von Kotzebue et effectuée au début du XIXe siècle autour du monde, Von Eschscholtz découvre alors les vastes étendues de l’Ouest californien, recouvertes de ce curieux « coquelicot orangé », devenu depuis, l’emblème du 31e État des États-Unis d’Amérique.

Contrairement au pavot à opium (Papaver somniferum), une autre papavéracée qu’il est inutile de présenter, l’usage de l’eschscholtzia ne provoque ni accoutumance ni dépendance, cependant, ses propriétés pharmacologiques présentent beaucoup de similitudes avec l’opium.

Quelles sont les principales propriétés pharmacologiques des parties aériennes fleuries d’Eschscholtzia ?

Propriété sédative et hypnotique :

L’action sédative est notamment due à la protopine et à la californine. Les préparations à base d’Eschscholtzia diminueraient notamment la durée d’apparition de sommeil et amélioreraient ainsi sa qualité.

In vivo, des études montrent une activité hypnotique avec prolongation du temps de sommeil ainsi qu’une réduction de l’activité locomotrice spontanée dose-dépendante. Des travaux pharmacologiques ont en outre comparé l’extrait d’eschscholtzia à celui d’un produit de référence, le chlorazépate. Ces recherches ont mis en évidence un effet sédatif et inducteur du sommeil de façon dépendante de la dose, par le biais d’une action de type gabaergique.

L’effet sédatif de l’eschscholtzia est également en relation avec la modulation du taux de catécholamines. La plante inhibe la DOPA décarboxylase, la dopamine β-hydroxylase, ainsi que la monoamine oxydase de type B, empêchant ainsi la conversion de dopamine en noradrénaline. Elle diminue en effet la synthèse de l’adrénaline.

Propriété sur l’activité cérébrale :

Outre l’action sur les catécholamines, des alcaloïdes de l’eschscholtzia comme la protopine agissent sur la sérotonine en se liant aux récepteurs sérotoninergiques 5-HT.

Par ailleurs, les alcaloïdes benzylisoquinoléiques (réticuline) de la plante inhibent l’acétylcholinestérase et de la butyrylcholinestérase, ce qui ouvre la porte à une possible action cognitive de la plante.

Une étude de 2017 a montré qu’E. californica contient de la lipoxygénase, une protéine enzymatique impliquée dans la dégradation des lipides, la dégradation de la croissance et du développement, la sénescence ainsi que les réaction de défenses.

Propriété anxiolytique :

Cette action est due par ailleurs à certains alcaloïdes, comme la protopine, qui augmentent la liaison de l’acide gamma-aminobutyrique (GABA) aux récepteurs du GABA. D’autres alcaloïdes (protopine, cryptopine et allocryptopine) augmentent par conséquent la liaison du GABA aux membranes synaptiques dans le cortex cérébral.

Certains constituants de l’eschscholtzia agissent en se liant aux récepteurs de benzodiazépines, avec un effet dépendant de la dose. Une étude menée sur 264 patients atteints d’anxiété généralisée d’intensité faible à modérée a ainsi confirmé l’activité anxiolytique de la plante.

Propriété antalgique :

L’eschscholtzia module l’activité ou la demi-vie des enképhalines par modification de leur dimérisation ou de leur oxydation. Cette action sur les encéphalines ainsi que l’activité anticholinergique et antispasmodique de la protopine expliquent l’effet calmant et analgésique de la plante, et justifient son utilisation traditionnelle comme antalgique.

Propriété spasmolytique :

In vitro, la protopine et la californine de l’eschscholtzia exercent notamment une activité spasmolytique sur les muscles lisses intestinaux. Les propriétés anticholinergique et antispasmodique de la protopine ont donc été mises en évidence sur l’iléon.

Existe-il des précautions d’emploi concernant l’Eschscholtzia ?

Contre-indications :

  • L’eschscholtzia est contre-indiquée aux personnes allergiques aux plantes de la famille des papavéracées.
  • Sauf usage très ponctuel, éviter d’utiliser la plante en cas de glaucome, en relation avec la présence de sanguinarine.
  • Compte tenu de la présence d’alcaloïdes, l’EMA ne recommande pas son utilisation chez la femme enceinte ou allaitante, ni chez les enfants et adolescents de moins de 18 ans.

Précautions d’emploi :

  • Par ses propriétés, cette plante est à utiliser avec précaution chez les individus sous IMAO ou IRS, et traitement antihypertenseur. Prendre un avis médical avant une utilisation conjointe.
  • Comme pour toute utilisation de plante sédative, la prudence est conseillée en cas de conduite automobile et d’utilisation de machines, notamment à forte dose.

Interactions médicamenteuses :

  • L’extrait d’eschscholtzia et ses alcaloïdes majeurs (protopine, escholtzine, allocryptopine, californidine) exercent une forte inhibition du CYP3A4, du CYP2C9 et du CYP2C19, dépendante du temps, et une inhibition réversible du CYP2D6, ce qui indique que la plante peut potentiellement interagir avec les médicaments empruntant ces voies métaboliques au niveau du foie.

Comment prendre l’Eschscholtzia et à quel dosage ?

Forme sèche :

  • En complément alimentaire, sous forme d’extrait standardisé de plante fraîche, d’extrait sec, d’extrait aqueux sec, de poudre, en gélules ou comprimés.

Forme liquide :

L’Eschscholtzia en préparation magistrale d’extraits standardisés sous forme liquide (EPS)

En association avec la valériane :

Dans les troubles du sommeil, plus particulièrement en cas de difficultés d’endormissement et /ou dans un contexte de rumination, d’hyperidéation mentale, de tensions ou de contractures musculaires, de sevrage de somnifères ou d’anxiolytiques (benzodiazépines), d’anxiété généralisée diurne, de manifestations somatiques d’angoisse.

En association avec la passiflore :

Pour les troubles du sommeil chez un sujet hyperactif et anxieux.

En association avec le griffonia :

Contre l’endormissement difficile, notamment en cas de retard de phase, de sevrage de somnifères de type zopiclone ou zolpidem.

En association avec le millepertuis :

Dans la lutte contre les états anxiodépressifs, avec angoisse diurne et agitation mentale.

En association avec l’aubépine :

Dans l’utilisation d’un traitement de fond de troubles du sommeil du sujet neurotonique avec éréthisme cardiaque, hyperactivité du système sympathique.

 

Sources bibliographiques médicales et essais cliniques :

 

Clémentine. M.
Rédactrice d’articles scientifiques
Naturopathe – Aromathérapeute / Herboriste – Phytothérapeute
Consultante en phyto-aromathérapie Clinique et Ethnomédecine

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