Au moment où l’Occident basculait dans le IIIe millénaire, le mucuna était quasiment inconnu de la myriade des plantes médicinales. Il fit son apparition sous forme d’extrait standardisé de plante fraîche destiné à la préparation magistrale à la fin des années 2000, se faisant ainsi rapidement connaître dans le monde de la phytothérapie. La multiplication des travaux scientifiques l’a désormais rangé parmi les plus belles ressources de la discipline.
Un peu d’histoire
En médecine ayurvédique dès le IIe siècle, la graine de pois Mascate (mucuna pruriens) est en effet conseillée par voie orale dans les atrophies musculaires, les paralysies de la face, la débilité (Chakara), dans les troubles respiratoires et en application locale contre les blessures (Sushruta).
En médecine indienne, la graine est réputée comme tonique nerveux et aphrodisiaque pour l’homme et la femme. Elle est conseillée dans les maladies nerveuses comme la maladie de Parkinson. Elle est également prescrite dans les morsures de serpent.
Quelles sont les principales propriétés pharmacologiques des graines de Mucuna ?
Activité dopaminergique et maladie de parkinson :
Dans un modèle de maladie de Parkinson, l’administration de mucuna s’est montrée deux fois plus efficace que la L-dopa de synthèse pour diminuer les troubles moteurs. La prise d’une dose unique de mucuna, chez des patients parkinsoniens, présente également des avantages par rapport à la L-dopa de synthèse associée à un inhibiteur de la dopa-décarboxylase. D’une part, le mucuna agit rapidement du fait de sa meilleure biodisponibilité. D’autre part, la durée d’action de celui-ci est plus longue ; limitant ainsi les alternances brutales de dyskinésies et de symptômes parkinsoniens (rigidité, tremblements…) survenant lors de la prise des traitements de référence. La teneur significative en L-dopa du mucuna, bien évaluée notamment par chromatographie en couche mince à haute performance, pourrait expliquer partiellement son activité antiparkinsonienne.
L’efficacité et les propriétés neuroprotectrices du mucuna sont également liées à la présence d’autres constituants que la L-dopa qui permettent d’augmenter l’efficacité de cette dernière, comme l’ubiquinone (= coenzyme Q10 = coQ10) et le NADH. Ces deux molécules ont des propriétés antioxydantes et augmentent la respiration mitochondriale, dont notamment l’activité du complexe I de la chaîne respiratoire, laquelle joue un rôle clé dans la physiopathologie de la maladie. La présence du coQ10 et du NADH pourrait également expliquer que la poudre de graines de mucuna restaure significativement les taux de lévodopa, dopamine, noradrénaline et sérotonine endogènes.
De plus, chez les patients parkinsoniens, de nombreux dommages oxydatifs sur l’ADN se rencontrent du fait d’un taux de cuivre divalent anormalement élevé au niveau cérébral. Le traitement avec le L-dopa de synthèse associé à ce fort taux en cuivre entraîne davantage de lésions. Le mucuna, grâce à sa propriété de chélation des ions cuivre et fer, permet une réelle protection du cerveau contre les espèces oxydantes.
Action antidépressive de type dopaminergique :
Dans divers modèles expérimentaux de dépression, l’étude de l’effet des extraits hydroalcooliques du mucuna a montré qu’ils exercent une action antidépressive, médiée par une interaction avec le système dopaminergique.
Action sur le déficit androgénique et sur la fertilité masculine :
La consommation de mucuna réduit significativement les altérations du sperme liées par augmentation des défenses antioxydantes. Elle permet également d’accroître la concentration et la motilité du sperme. Cette propriété se confirme chez l’homme asthézoospermique. Il a aussi été mis en évidence, chez des messieurs hypofertiles, que le mucuna restaure les enzymes antioxydantes (SOD, catalase…), et améliore la qualité du sperme. De plus, M. pruriens permet une augmentation significative de la testostérone et de la LH, essentielle pour accroître la spermatogénèse. La prise de mucuna réduit également les taux de FSH, dont l’augmentation se corrèle avec des dommages au niveau des tubes séminifères. Par ailleurs, la plante diminue la prolactine.
Action sur l’hormone de croissance :
L’hormone de croissance a un rôle primordial pour la croissance chez l’enfant. Elle permet aussi le maintien de la santé à l’âge adulte. Chez les femmes, l’administration d’une dose unique de L-dopa augmente de manière importante l’hormone de croissance et diminue parallèlement la prolactine, hormone hyperplasiante.
Action sur le syndrome des jambes sans repos :
Le syndrome des jambes sans repos se carctérise par un besoin urgent de mouvoir les membres inférieurs. Celui-ci est induit et aggravé par le repos. Cette pathologie apparaît être un dysfonctionnement du système dopaminergique, lui-même étant aussi fréquemment associé avec une déficience ferrique. La prescription de L-dopa, constitue la solution la plus efficace chez les personnes souffrant de ce syndrome.
Activité hormonale et anticancéreuse :
Une étude de 2018 a montré que l’extrait de graine de Mucuna pruriens peut inhiber la prolifération des cellules de cancer du sein T47D et MCF-7 sensibles à la prolactine, en induisant des lésions de l’ADN, un arrêt du cycle cellulaire en phase G1 et une apoptose, de façon plus efficace que la L-dopa. En outre, l’effet anticancéreux induit par le mucuna est associé à une régulation négative de l’expression de la prolactine, supprimant en outre la voie de signalisation JAK2/STAT5A/Cycline D ; voie validée par l’utilisation de la bromocriptine, un agoniste dopaminergique. L’hyperprolactinémie liée au cancer du sein conférant une résistance au cisplatine, les auteurs ont observé qu’en inhibant la prolactine, la mucuna améliore l’efficacité du cisplatine lorsqu’ils sont tous les deux associés dans le traitement des cellules cancéreuses mammaires.
Existe-t-il des précautions d’emploi concernant le Mucuna ?
Contre-indications :
- Le mucuna est contre-indiqué chez la femme enceinte ou allaitante, en raison de son activité hormonale.
- Éviter en cas de troubles cardiovasculaires, hépatiques ou psychiatriques (schizophrénie), d’ulcère gastroduodénal ou de cancer de la peau (mélanome).
Précautions d’emploi :
- L’association du mucuna avec des antidépresseurs ainsi que son utilisation chez des patients ayant un diabète insulinodépendant nécessitent un suivi médical.
Interactions médicamenteuses :
- En théorie, la teneur en L-dopa de la plante pourrait provoquer des interactions avec les médicaments anesthésiques, les antidépresseurs tricycliques, les antipsychotiques, les inhibiteurs de la monoamine-oxydase (IMAO), les hypotenseurs, les hypoglycémiants.
Comment prendre le Mucuna et à quel dosage ?
Forme sèche :
- En complément alimentaire, seul sous forme de gélules d’extrait standardisé.
Forme liquide :
- Extrait fluide de plante fraîche standardisé : 5 à 10 ml par jour dans un verre d’eau, de préférence le matin.
Sources bibliographiques médicales et essais cliniques :
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