Bienfait de la terre surnommé « essence souveraine », le ginseng est considéré depuis des millénaires dans tous l’Extrême-Orient comme LA plante envoyée par les dieux pour aider les hommes depuis leur création. Ce gnome végétal, cet homoncule ayant capté les énergies telluriques est, quelle que soit la date à laquelle remonte sa première utilisation, considéré comme une panacée (de la déesse Panakeia, fille d’Asclépios dieu de la médecine, qui donnera ultérieurement l’appellation scientifique du ginseng, Panax), soit la plus prestigieuse espèce végétale de la pharmacopée chinoise.
Un peu d’histoire
Consommée depuis au moins 4000 ans, elle fait partie de la pharmacopée de la médecine chinoise depuis plus de 2000 ans en tant que fortifiant, « tonique de l’énergie vitale » (Qi), et stimulant cardiaque. La première introduction européenne du ginseng vient du navigateur d’origine maure Ibn Cordoba, qui en rapporta en Espagne au IXe siècle, mais cela ne fut guère suivi d’effets, puisqu’il faudra attendre le XIIIe siècle pour qu’on reparle de nouveau de lui; c’est, du moins, ce que fera Marco Polo dans son Livre des merveilles (1298), sans pour autant ramener quoi que ce soit en Europe. Il faudra donc patienter jusqu’au début du XVIIe siècle pour que l’Europe daigne enfin prêter un peu d’attention à cette racine que l’on voit être importée de plus en plus.
Le ginseng américain, quant à lui, fut découvert également au début du XVIIe siècle, au moment où le ginseng asiatique fit son apparition en Occident. Les propriétés similaires de son alter ego américain furent mises en évidence en Nouvelle-France chez les Iroquois par un missionnaire jésuite au nom prédestiné, le père Joseph François Lafitau. Ce cousin américain fut l’origine d’une véritable ruée vers l’or végétal, au point que ses racines séchées furent rapidement exportées en Chine, dans un commerce qui devint pendant un temps le second en importance après la traite des fourrures.
Le ginseng est donc originaire de deux territoires distants l’un de l’autre de milliers de kilomètres, comme si une graine primordiale avait donné naissance à deux embryons, chacun accouchant d’une plante distincte, ce que, dans les faits, le ginseng est tout à fait capable, réussissant là une prouesse très rare dans le monde végétal.
Quelles sont les principales propriétés pharmacologiques de la racine de Ginseng ?
Amélioration des capacités physiques :
Traditionnellement utilisé dans les asthénies fonctionnelles, le ginseng est notamment considérée comme une plante adaptogène. Il stimule la résistance de l’organisme de façon non spécifique. Il améliore les performances physiques et aide de fait les convalescents à reprendre des forces. Dans une synthèse d’études déjà ancienne portant sur les performances physiques, il a été rapporté que le ginseng augmente significativement l’oxygénation et améliore la fréquence cardiaque après 1 à 9 semaines de traitement.
Plusieurs études montrent l’intérêt du ginseng en tant que traitement adjuvant du cancer, notamment pour lutter contre la fatigue extrême ressentie par les patients, pour restaurer leurs forces physiques, et pour améliorer leur qualité de vie.
Amélioration des capacités intellectuelles et activité neuropsychique :
Il stimule les performances cognitives (concentration, attention, capacité de mémorisation). Neuroprotecteur, il réduit la fatigue intellectuelle. In vivo, le ginsénoside R réduit les troubles de la mémoire liés à une ischémie cérébrale par une modulation épigénétique du BDNF.
Des essais cliniques et in vivo montrent que la prise de ginseng améliore l’adaptation au stress et l’humeur. Ces effets se doivent probablement à une régulation des neuromédiateurs cérébraux. En effet, le ginseng stimule le GABA.
Le ginseng possède un effet dopaminergique, notamment en modulant l’expression génique de la tyrosine hydroxylase. Il module l’activité du système nerveux dopaminergique et les changements de l’activité motrice spontanée pendant la nuit chez le sujet âgé.
En outre, le ginseng exerce un effet neuroprotecteur sur les neurones dopaminergique de maladie de Parkinson. Cette activité antiparkinsonienne est liée aux ginsénosides Rd et Re, et passe par une réduction du stress oxydant et de l’inflammation, ainsi que par une action anti-apoptotique et une préservation de l’intégrité de la barrière vasculaire cérébrale.
Par le même mécanisme, le ginsénoside Rd atténue les lésions cérébrales ischémiques après un accident vasculaire cérébral (AVC), et confirme son activité neuroprotectrice, notamment en inhibant l’activation de la microglie et son inflammation. In vitro, il favorise la croissance des neurites (axone ou dendrite).
Propriété immunostimulante :
La racine de ginseng augmente la production de lymphocytes T et B et accroît la phagocytose. In vivo, elle stimule l’activité des NK. Chez l’homme, la prise d’un extrait de ginseng associée à un vaccin antigrippal potentialise la vaccination, et protège mieux contre le rhume par une augmentation significative du titre d’anticorps et de l’activité des cellules NK.
Modulateur hormonal de l’axe hypophyso-cortico-surrénalien :
Le ginseng réduit la sécrétion excessive de cortisol plasmatique suite à un stress chronique. In vivo, il a été mis en évidence que le ginseng exerce des effets comparables à ceux induits par le diazépam (anxiolytique de référence). Chez l’humain, il régule les hormones du stress au cours de la ménopause et améliore le rapport cortisol/DHEA.
Propriété anti-inflammatoire :
In vitro, les saponines du ginseng ont un effet anti-inflammatoire sur les macrophages en inhibant la production de monoxyde d’azote (NO), de facteur de nécrose tumorale alpha (TNFα), d’interleukine-1b (IL-1b), et en inhibant le NF-kB. Cette activité de réduction de l’inflammation a été montrée in vitro pour le ginsénoside Rh3 sur les kératinocytes exposés aux UV. Il en est de même pour les ginsénosides Rg5 et Rk1 au niveau des kéranocytes et des macrophages, suggérant un intérêt dans la dermatite atopique.
Au niveau articulaire, le ginseng exerce des effets protecteurs sur le cartilage en freinant, de façon variable selon le mode d’extraction, la métalloprotéase matricielle, principale enzyme de dégradation de la matrice de collagène du cartilage articulaire.
Propriété antiallergique et antioxydante :
In vitro, le 20-S-Protopanaxatriol inhibe la réponse inflammatoire liée à l’allergie. L’extrait de ginseng rouge empêche le prurit histamino-dépendant par inhibition de la voie H1R/TRPV1 dans les neurones sensoriels.
La consommation chronique de ginseng atténue le stress oxydatif lié au vieillissement. Il en est de même lorsque celui-ci est induit par un agent chimique dans une lignée de cellules microgliales.
Stimulation de la NO synthase :
Le ginseng stimule la NO synthase inductible et la production de monoxyde d’azote (NO) au niveau du cerveau du cerveau, des reins, de l’endothélium pulmonaire et des vaisseaux périphériques, du cœur et de la sphère uro-génitale, notamment au niveau du corps caverneux. Cette propriété vaso-dilatatrice pourrait justifier la réputation aphrodisiaque du ginseng et son emploi traditionnel (au moins 2000 ans) pour combattre l’impuissance. Il explique aussi son effet cardioprotecteur.
Propriétés hépato protectrice, métabolique et antidiabétique :
Au niveau hépatique :
Le ginseng exerce un rôle bénéfique dans le traitement de diverses maladies hépatiques telles que l’hépatite, la fibrose hépatique, la cirrhose, le carcinome hépatocellulaire, l’insuffisance hépatique aiguë et l’hépatotoxicité aiguë ou chronique.
Au niveau métabolique :
Le ginseng prévient l’obésité, l’adiposité et l’hypertrophie du tissu adipeux en limitant l’inflammation et l’angiogenèse.
Dans le diabète de type 2 :
Le ginseng diminue le taux de cholestérol et améliore la tolérance au glucose.
Autres propriétés :
- Gastro-protecteur
- Protecteur intestinal
- Protecteur vasculaire
- Prévention de l’hypertrophie bégnine de la prostate
- Atténuation des effets de la baisse des œstrogènes
- Effet anti-ostéoporose
- Amélioration du syndrome de l’œil sec
- Anticancéreux
Existe-il des précautions d’emploi concernant le Ginseng ?
Précautions d’emploi :
- Peut entraîner une gynécomastie chez l’homme.
Contre-indications :
- Contre-indiquée chez la femme enceinte, in vitro, le ginseng est tératogène.
- En raison du manque de données toxicologiques et par insuffisance d’études, le ginseng n’est pas recommandé chez la femme allaitante ainsi que chez l’enfant non pubère.
- Le ginseng est déconseillé en cas d’hypertension artérielle sévère et de troubles psychiatriques sévères non stabilisés.
- Contre-indiquée chez les patients hémophiles ou s’apprêtant à subir une intervention chirurgicale.
- Éviter dans les cancers gynécologiques.
Interactions médicamenteuses :
- Des interactions médicamenteuses sont possibles avec les anticoagulants (warfarine), les inhibiteurs de la monoamine oxydase (IMAO), ainsi que les triptans. Un doute persiste sur une interaction avec la digitaline.
Comment prendre le Ginseng et à quel dosage ?
Forme sèche :
- En médicament (en dilution homéopathique) ou complément alimentaire, sous forme d’extrait de plante fraîche standardisé, d’extrait sec, de poudre, en gélules ou comprimés, ou en vrac, seul ou associé à d’autres plantes.
Forme liquide :
- Extrait fluide de plante fraîche standardisé : 5 à 15 ml par jour dans un verre d’eau.
- Extrait hydroalcoolique (flacon, ampoules), teinture-mère : 25 à 50 gouttes 1 à 2 fois / jour dans un verre d’eau.
Quelle que soit la forme galénique utilisée, le ginseng s’emploie le matin et/ou à midi mais pas le soir.
Le Ginseng en préparation magistrale d’extraits standardisés sous forme liquide (EPS)
Association avec le ginkgo biloba :
Pour l’amélioration des performances cognitives, notamment en préparation d’examens ou de concours (action démontrée dans un test de simulation de conduite automobile au cours d’une étude en double aveugle contre placebo, après une prise unique per os).
Association avec la rhodiole :
En cas de surmenage physique et psychique; syndrome de fatigue chronique; traitement su syndrome d’épuisement et prévention de sa récidive.
Association avec le guarana :
Dans l’amélioration de la vigilance (conduite de voiture, machines, engins), préparation à court terme d’épreuve physique et sportive ou intellectuelle (examens).
Association avec le mucuna :
Contre la dépression de type dopaminergique; maladie de parkinson en complément du traitement conventionnel.
Association avec le millepertuis :
Pour lutter contre la dépression liée à un stress chronique ou dans un contexte de surmenage ou d’épuisement.
Association avec le tribulus et le cassis :
Dans les activités physiques (préparation et récupération) chez le sportif et la personne de plus de 50 ans.
Association avec l’astragale :
En prévention du vieillissement, immunosénescence, renforcement des défenses immunitaires et générales, aide à la vitalité.
Association avec le curcuma :
En traitement des troubles métaboliques, obésité, diabète, avec troubles hépatiques et risque vasculaire accru.
Association avec l’olivier et le chardon-marie :
Pour traiter le syndrome métabolique, diabète de type 2, notamment avec hypertension artérielle et dyslipidémie.
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