Une légende prétend qu’un faucon se nourrirait de suc de piloselle afin de perfectionner sa vue. Hierakon, dans lequel on devine le nom latin de la piloselle. Hieracium, constituait déjà le nom grec de plusieurs Chicoracées. Mais il contient aussi Hierax, « faucon ». On a donc donné à la piloselle ce nom d’Hieracium, « sans que l’on aperçoive d’explication en dehors de légendes populaires ».
Qu’est ce que la piloselle ?
La Piloselle (Pilosella officinarum), anciennement classée sous le genre Hieracium, faut partie de la famille des Astéracées. Il s’agit d’une plante à fleurs aux noms variés tels que « Épervière piloselle, » « Oreille de souris, » ou « Herbe à l’épervier. » Elle prospère dans des environnements arides et pauvres en nutriments. Elle offre une source d’antibiotiques et de diurétiques naturels.
Son nom « Pilosella » évoque la présence abondante de poils sur la plante. Son ancien nom « Hieracium » vient du grec ancien « Hierax, » signifiant « faucon » ou « épervier. » Cette dénomination découle d’une croyance populaire affirmant que ces oiseaux consommaient la sève de la plante pour améliorer leur vue.
La Piloselle est une petite plante vivace stolonifère de 10 à 15 centimètres de hauteur, parfois 30 cm. Elle produit des rejets allongés autour de sa base. Celle-ci porte des feuilles oblongues, grises en dessous et couvertes de longs poils. Ses fleurs jaunes, en capitules solitaires dressés, sont plus petits que les pissenlits. Ses fruits sont des akènes blanc grisâtre coiffés d’une aigrette soyeuse.
La Piloselle est répandue dans toute l’Europe (à l’exception de la région méditerranéenne) et en Asie occidentale jusqu’à une altitude de 3 000 mètres. Elle prospère sur des sols secs, dans les landes à bruyères, les remblais, les clairières, les rocailles, et les tourbières.
Au Moyen Âge, ses feuilles comestibles séchées étaient utilisées contre les affections respiratoires, les problèmes de foie et d’estomac, et en cataplasme pour les ecchymoses. La pharmacologie moderne lui attribue des propriétés anti-infectieuses, détoxifiantes, astringentes, cholagogues, apéritives, dépuratives, vulnéraires, détersives et diurétiques. Elle contient des composés tels que l’ombelliférone. Cette dernière possède des propriétés antibiotiques, antioxydantes, anti-inflammatoires, anti-hyperglycémiques et anti-tumorales.
La plante renferme divers éléments, dont des flavonoïdes responsables de l’action diurétique, des glucosides aux propriétés antibiotiques, des acides phénols antibactériens, et du manganèse. Elle est également riche en ombelliférone aux vertus antibiotiques et antihémorragiques.
Un peu d’histoire
Le choix du faucon n’est peut-être pas si anodin tant on sait à quel point cet oiseau possède une vue perçante. Tout ceci nous a brièvement rattachés à l’Antiquité, mais à cette lointaine époque, il n’est nullement question de piloselle; elle n’est d’ailleurs mentionnée par aucun des anciens auteurs antiques. Ça n’est qu’au XIIe siècle qu’on la rencontre pour la première fois; consignée par la main de cette grande dame que fut Hildegarde. Elle lui attribue pour lors le nom de Musore.
Hildegarde nous explique que la piloselle permet de diminuer les humeurs mauvaises accumulées dans le corps. Sans doute fit-elle référence aux effets diurétiques et dépuratifs de la piloselle, chassant chlorures, urée et autres toxines en dehors de l’organisme.
Le nom même de la piloselle émane du Moyen-Âge tardif, et provient de ce que, comme le souligne Gaspard Bauhin (1560-1624), la piloselle est copieusement poilue. On la décrit dans l’Hortus sanitatis de 1485 ainsi que dans l’Herbarius de 1536.
En 1554, Matthiole écrit que « les médecins ont appris qu’elle constitue un remède à la dysenterie et à la métrorragie. De plus, macérée dans du vin un peu âpre, elle amène les plaies, tant internes qu’externes, à se fermer : elle est d’un grand secours contre les vomissements de bile, les crachements de sang, les entérites, les hernies intestinales et toutes les fractures, surtout du crâne. Il ne manque même pas de médecins, surtout contemporains, qui la recommandent dans les affections du foie et de la rate et dans les débuts d’hydropisie. On l’ajoute utilement aux boissons dans des cas de plaies internes et aux emplâtres et baumes vulnéraires, car, non seulement elle cicatrise les blessures récentes, mais elle guérit aussi les ulcères rebelles ».
Quelles sont les principales propriétés pharmacologiques de la Piloselle ?
La piloselle est une plante médicinale qui possède des propriétés pharmacologiques intéressantes pour la santé. La Piloselle doit ses vertus thérapeutiques à sa riche composition en principes actifs. Parmi les composés identifiés par les chercheurs, on retrouve :
- Hydroxycoumarines telles que l’ombelliférone et la skimmine
- Flavonoïdes tels que l’apigénol, la lutéoline et le cynaroside.
- Tannins.
- Triterpénoïdes comme l’amyrine, le taraxérol et le taraxastérol.
- Acides organiques, parmi lesquels l’acide caféique et l’acide chlorogénique.
- Vitamine C
- de l’inuline (dans la racine)
Selon les Cahiers de l’Agence (1998), la Piloselle est traditionnellement utilisée pour plusieurs fins, notamment pour faciliter les fonctions d’élimination urinaire et digestive, ainsi que pour favoriser l’élimination rénale de l’eau. Ces propriétés sont attribuées aux divers composés actifs présents dans la plante, notamment les hydroxycoumarines aux effets diurétiques, les flavonoïdes aux propriétés antioxydantes, les tannins aux effets astringents, et les acides organiques qui contribuent à l’équilibre digestif. La présence de vitamine C dans la Piloselle ajoute également à son potentiel bénéfique pour la santé.
Activité rénale
Des essais in vitro effectués à la fin des années 1940 ont démontré que l’ombelliférone libre exerce une activité bactériostatique. Cette coumarine est capable d’inhiber des colonies bactériennes comme Brucella (abortus et melitensis) ainsi que Salmonella typhimurium principalement, mais aussi Staphylococcus aureus et Escherichia coli. Le 4′-O-β-D-glucopyranoside d’isotéine, une flavonoïde isolé de l’extrait méthanolique des parties aériennes de Hieracium pilosella, inhibe la croissance de Pseudomonas aeruginosa. Cette activité se potentialise notamment par la présence des acides-phénols, qui sont antibactériens.
Cette activité traditionnellement reconnue serait liée à la présence de flavonoïdes, qui favorisent l’élimination de l’urée, de l’acide urique, et des chlorures. L’action diurétique de la piloselle est également liée à sa richesse en inuline. Ce composé, un mélange de polysaccharides et d’oligosaccharides constitué de polymères de fructose se terminant par un α-D-glucose relié à cette chaîne, est un fructane qui augmente la pression osmotique au niveau du glomérule rénal. Cette action entraîne une plus grande élimination de l’eau filtrée par ce dernier, et provoque donc un effet diurétique, ce qui permet également de soulager l’inflammation des voies urinaires.
La piloselle augmente la vasodilatation du parenchyme rénal, ce qui améliore ainsi le débit de filtration glomérulaire.
Activité hépatodigestive
L’ombelliférone exerce par ailleurs une activité cholérétique, sans effet cholagogue. L’action des acides-phénols associés à l’ombelliférone sur la qualité de la bile explique l’action anti-hypocholestérolémiante de la piloselle. Elle a également une activité spasmolytique au niveau du sphincter d’Oddi. Cette action est due en effet aux propriétés astringentes de ses tanins, la piloselle exerce une activité antidiarrhéique et cicatrisante intestinale.
La Piloselle possède une riche histoire d’utilisation traditionnelle pour combattre diverses infections. Des recherches ont été menées pour confirmer ses propriétés anti-infectieuses en évaluant son efficacité contre des souches bactériennes courantes, y compris des souches particulièrement virulentes telles qu’Escherichia coli, Streptococcus lactis, Salmonella typhimurium et Staphylocuccus aureus. Les résultats de ces études ont révélé que la Piloselle détient bel et bien une activité antibactérienne, montrant une efficacité notable contre la salmonelle, une bactérie responsable de nombreuses infections d’origine alimentaire, souvent liées à des gastro-entérites.
Outre ses propriétés anti-infectieuses, on reconnait également la Piloselle pour ses autres bienfaits pour la santé. Par exemple, lorsqu’on la consomme sous forme fraîche, elle démontre la capacité de réduire les niveaux de cholestérol dans le sang. De plus, elle agit comme un cholérétique en stimulant la production de bile. Elle favorise ainsi la digestion et peut contribuer à prévenir la formation de calculs biliaires.
Des études ont également mis en lumière l’intérêt de la Piloselle dans le traitement des brucelloses, une maladie infectieuse causée par des bactéries du genre Brucella. Cette maladie peut engendrer des symptômes tels que des courbatures, des sueurs et de la fièvre, connue sous le nom de fièvre de Malte, qui affecte à la fois le bétail et les êtres humains. En conséquence, la Piloselle est utilisée à la fois en médecine traditionnelle humaine et vétérinaire pour ses propriétés anti-infectieuses.
Propriétés antioxydantes, anti-inflammatoires et antiprolifératives
Les composés polyphénoliques, tels que ceux présents dans la Piloselle, ont démontré de manière générale une gamme impressionnante de bienfaits pour la santé. Ils sont connus pour leurs propriétés antioxydantes, anti-inflammatoires et cardioprotectrices. En outre, ces composés montrent des effets antimicrobiens, antimutagènes et antiprolifératifs. Plusieurs constituants de la Piloselle, notamment l‘acide chlorogénique, l’apigénine-7-O-glucoside et l’ombelliférone, ont montré une activité antioxydante significative.
La Piloselle renferme également des flavonoïdes et des composés phénoliques reconnus pour leur potentiel antioxydant. Ces composés sont capables de neutraliser les radicaux libres, réduisant ainsi le stress oxydant et contribuant à la protection cellulaire.
Des études menées en 2011 ont mis en évidence les effets antioxydants d’un flavonoïde spécifique isolé de la Piloselle, démontrant également son action antiproliférative contre les cellules du carcinome colorectal. Ces découvertes ouvrent la voie à de nombreuses perspectives de recherche sur les utilisations potentielles de la Piloselle.
La Piloselle est étudiée pour divers autres usages traditionnels. Elle montre des signes d’activité dépurative. Cela en fait un candidat prometteur pour soutenir les mécanismes d’élimination naturels de l’organisme. De plus, des preuves préliminaires suggèrent qu’elle pourrait avoir des effets bénéfiques dans le traitement de problèmes cardiovasculaires, de maladies inflammatoires et de certains types de cancer. Des études complémentaires restent nécessaires pour confirmer ces avantages potentiels.
Enfin, on connait la Piloselle pour son action stimulante de la toux. Elle a le pouvoir de réduire la production de mucosités. Cela en fait un remède naturel efficace pour les troubles respiratoires tels que l’asthme, la coqueluche et la bronchite. On l’utilise également pour stimuler l’énergie en cas de convalescence et d’asthénie. Elle possède des propriétés cicatrisantes en application externe. Cela en fait un agent astringent efficace pour contrôler les saignements et favoriser la cicatrisation des blessures et des coupures.
Existe-t-il des précautions d’emploi concernant la Piloselle ?
Avant d’utiliser la Piloselle, il est essentiel de prendre en compte les précautions nécessaires pour garantir la sécurité de la santé.
L’utilisation de la Piloselle pendant la grossesse ou l’allaitement nécessite un avis médical préalable. De plus, la Piloselle est contre-indiquée chez les enfants de moins de 18 ans et chez les patients souffrant de cardiopathies et de neuropathies sévères.
Pour assurer une augmentation de la diurèse, il faut maintenir une hydratation adéquate tout au long du traitement. En cas d’utilisation de la Piloselle en automédication, on recommande de consulter un médecin ou un professionnel de la santé qualifié si les symptômes s’aggravent pendant l’utilisation de la plante. De plus, la survenue de fièvre, de difficultés urinaires, de spasmes ou de sang dans les urines nécessite une consultation médicale.
On déconseille d’utiliser la Piloselle pendant une crise de colique néphrétique. Cependant, la plante peut s’utiliser immédiatement après la crise. La Piloselle ne convient pas pour le traitement d’une éventuelle rétention hydrique causée par une insuffisance rénale ou une insuffisance cardiaque. La présence d’œdèmes impose également une consultation médicale.
La Piloselle peut potentiellement interagir avec certains médicaments. On retrouve parmi eux les inhibiteurs de l’enzyme de conversion de l’angiotensine (IEC), les antagonistes des récepteurs de l’angiotensine (Sartan), les diurétiques, la digoxine, les agents antiarythmiques (AAR), les corticoïdes, les médicaments hypokaliémiants et d’autres plantes diurétiques. Ces derniers peuvent entraîner une potentialisation des effets indésirables. Parmi ces effets on peut citer la déshydratation, l’insuffisance rénale, l’hypokaliémie et les troubles du rythme cardiaque. De plus, la Piloselle peut augmenter les concentrations plasmatiques de lithium.
On recommande donc de consulter un professionnel de la santé avant de commencer un traitement à base de Piloselle, en particulier si vous prenez d’autres médicaments.
Comment prendre la Piloselle et à quel dosage ?
La Piloselle peut se consommre sous forme de tisanes. Cependant, on préfère utiliser des parties fraîches de la plante, surtout pour traiter des infections urinaires bénignes. Le séchage de la Piloselle peut entraîner une perte de certaines de ses propriétés bénéfiques. On récolte les parties aériennes de la plante, y compris les tiges, les feuilles et les fleurs au moment de la floraison. On les utilise couramment en herboristerie.
Il n’existe actuellement aucune recommandation spécifique en ce qui concerne les dosages et les posologies de la Piloselle. Les recommandations en vigueur se basent principalement sur l’usage traditionnel de cette plante.
La posologie généralement suggérée varie entre 500 et 1200 mg de poudre de Piloselle par jour. Cependant, ces quantités peuvent fluctuer en fonction des besoins individuels et des différentes formulations disponibles en supplémentation, car la teneur en principes actifs peut varier d’un produit à l’autre. En cas de doute, on recommande fortement de consulter un professionnel de la santé pour obtenir des conseils personnalisés.
- En complément alimentaire sous forme d’extrait sec aqueux en gélules.
- Extrait fluide de plante fraîche standardisé : 5 à 10 ml par jour dans un verre d’eau ou dans 1L à boire réparti sur la journée.
- Infusion : 100 g de plante fraîche/1L d’eau pendant 10 min, 1 tasse 2 à 3 fois par jour.
Sources bibliographiques médicales et essais cliniques
- Stanojevic L. et al., Antioxidant Activity and Total Phenolic and Flavonoid Contents of Hieracium pilosella L. Extracts, Sensors, 2009
- Haag-Berrurier M. et al., Control of the active antibrucellosis principes in Hieracium pilosella L., before and after stabilization. Pharm Acta Helv., 1960
- Adegbola P. et al., Antioxidant and anti-inflammatory medicinal plants have potential role in the treatment of car diovascular disease ; a review, Am J Car diovasc Dis., 2017
- Frey F.M. et al., Antivacterial activity of traditional medicinal plants used by Haudenosaunee peoples of New York State; BMC Complement Altern Med., 2010