L’histoire de l’huile essentielle d’Aneth, racontée par une Naturopathe

Née quelque part entre Istanbul et Odessa, l’aneth est mentionné dans un traité médical égyptien datant de plus de 5 000 ans. Longtemps cantonnée à une aire géographique restreinte, l’huile essentielle d’Aneth n’a pas immédiatement rayonné à travers l’Europe. Pourtant, les Romains, séduits par son odeur anisée et voyant en elle un symbole de vitalité, l’intégraient à leur quotidien. Des gladiateurs se sustentant de plats aromatisés à l’aneth aux recettes raffinées d’Apicius, cette herbe aromatique a lentement mais sûrement conquis les palais et les cœurs des Européens du Nord. Mais quelle est cette plante qui a traversé les âges et les cultures, et quelles sont les caractéristiques qui rendent son huile essentielle si prisée aujourd’hui ?

Quelles sont les caractéristiques de l’Aneth ?

L’aneth, connu scientifiquement sous le nom d’Anethum graveolens, appartient à la famille des Apiacées. Cette plante herbacée est cultivée principalement pour ses feuilles et ses graines très aromatiques. Par son odeur et ses propriétés, l’aneth rappelle vaguement le fenouil, d’où ses surnoms de « fenouil bâtard » ou « faux anis ».

En termes de description, l’aneth est une plante annuelle mesurant entre 50 et 120 cm de haut, avec un étalement d’environ 30 cm. Ses feuilles sont caractéristiquement fines, filiformes et de couleur vert bleuté. Pendant la floraison, l’aneth produit des ombelles comportant 15 à 30 rayons de fleurs jaune verdâtre. Les fruits de l’aneth sont petits, ovales, aplatis, de couleur brune, et se divisent en deux graines lors du séchage. Ils mûrissent généralement en août-septembre.

Le nom « aneth » dérive du latin anethum, lui-même emprunté au grec ἄνηθον – anêthon. Le terme graveolens en latin signifie « d’odeur forte ». Parmi ses synonymes, on trouve Anethum sowa Roxburgh et Peucedanum graveolens. En français, il est également appelé aneth odorant, fenouil puant ou faux anis.

Sur le plan de la composition chimique, les fruits de l’aneth contiennent une huile essentielle riche en carvone, myristicine et apiol, ainsi que des tanins et des mucilages.

Botaniquement, l’aneth est une plante herbacée, parfois bisannuelle, avec des tiges érigées et lisses. L’aneth présente des feuilles basales pétiolées et des inflorescences en ombelles sans bractées ni bractéoles. Ses fruits, de forme ellipsoïdale ou ovo-ellipsoïdale, s’aplatissent nettement sur le dos.

Cette plante se développe principalement dans les régions méditerranéennes et se cultive ou apparaît subspontanément en Europe méridionale, en Asie occidentale et en Afrique septentrionale. Reconnu pour ses propriétés carminatives et diurétiques, l’aneth sert fréquemment à aromatiser le linge.

Quelle est sa composition ?

L’huile essentielle d’aneth, caractérisée par des composants biochimiques spécifiques, est un choix de prédilection en aromathérapie. Sa composition inclut entre 25 et 55 % de limonène et 20 à 50 % de carvone, avec de faibles concentrations de trans dihydrocarvone et cis dihydrocarvone.

Cette huile essentielle, issue de la plante Anethum graveolens de la famille des Apiacées, se distingue par ses noms communs variés tels que Aneth, Aneth odorant, Faux anis, et Fenouil bâtard. Elle est principalement extraite des plantes fleuries et provient de régions telles que la France, la Bulgarie, la Hollande, la Pologne et la Roumanie.

Au niveau de sa composition biochimique, l’huile essentielle d’aneth se compose majoritairement de monoterpènes (60 à 65 %) et de cétones (28 à 30 %), incluant notamment du limonène, de l’alpha et beta phellandrène, et du paracymène. Elle contient également des oxydes monoterpéniques, monoterpénols, et coumarines.

Les caractéristiques physiques de cette huile sont également importantes : elle a une densité de 0,890 à 0,915 à 20°C, un indice de réfraction de 1,483 à 1,490 à 20°C, un pouvoir rotatoire de +70° à +82° à 20°C, et un point éclair à +60°C. Organoleptiquement, elle se présente comme une huile incolore à légèrement jaune avec une odeur douce, menthée et fraîche.

En termes d’indications, l’huile essentielle d’aneth est efficace pour diverses applications de santé et de bien-être. Elle aide à soulager les ballonnements, flatulences, et problèmes de digestion grâce à ses propriétés eupeptiques, antispasmodiques, stomachiques et carminatives. Elle est également bénéfique pour traiter l’aérophagie et les problèmes digestifs des nourrissons, grâce à son effet galactagogue. De plus, elle est utile en cas d’insuffisance hépatique, de douleurs rénales et de nausées. Sur le plan du bien-être, elle est recommandée pour combattre la déprime saisonnière, la fatigue intellectuelle, les tensions psychiques, et améliorer la concentration.

Quelles sont les propriétés pharmacologiques de l’huile essentielle de parties aériennes fructifiées d’Aneth ?

L’effet antispasmodique de l’huile essentielle d’aneth est démontré avec la carvone sur les muscles lisses vis-à-vis de l’acétylcholine et de l’histamine ; l’α-phellandrène réduit les contractions de l’intestin par interaction sur les récepteurs 5 hydroxytriptamine 3. Stimulante et antispasmodique digestive, elle augmente le tonus basal et les contractions de la musculature lisse intestinale, carminative. Cette plante est également antitoxique, diurétique antispasmodique des voies urinaires et antispasmodique rénale.

Détoxifiante et hépatoprotectrice, l’action détoxifiante de la carvone sur le foie est liée à la stimulation des cytochromes P-450 ou des enzymes de phase II comme la gluthation-S-transférase. Le limonène et la carvone présents dans l’huile essentielle d’Aneth stimulent la sécrétion biliaire, montrant un effet cholérétique et cholagogue. Fluidifiante dans les insuffisances hépatobiliaires et pancréatiques, l’Aneth augmente de fait la sécrétion de sucs gastriques.

La carvone abaisse en outre le taux de cholestérol et l’accumulation hépatique des triglycérides. Carminative, cholagogue et cholérétique grâce aux cétones qui lèvent les stases et redonnent le mouvement en général, l’Aneth est donc utile en cas de ballonnements, de météorismes ou encore de colopathies. Le limonène et la carvone stimulent la sécrétion biliaire.

Digestive, la carvone réduit les nausées par action sur la motilité gastrique et l’acidité gastrique lors des reflux gastro-œsophagiens. Le limonène, quant à lui,  stimule la microcirculation digestive.

Fluidifiante bronchique, mucolytique et antifongique, cette dernière action est liée à l’α-phellandrène et au limonène. L’Aneth est aussi cortison-like, il stimule l’axe hypophyso-corticosurrénalien et est de fait intéressante dans les états inflammatoires.

On lui confère également des activités antimicrobienne, antidépressive, hypolipidémiante par activation du peroxisome du PPAR-α (proliferator-activated receptor-α), ou encore tonique et stimulante générale, grâce aux monoterpènes qui deviennent positivants, car ils s’ionisent positivement et très facilement. On note également une inhibition de l’acétylcholinestérase et de la butyrylcholinestérase.

Comment utiliser cette huile essentielle ?

L’huile essentielle d’aneth, bénéfique pour la digestion, s’utilise principalement en application cutanée. Pour garantir une utilisation sûre et adaptée, consulter un professionnel reste conseillé. Cette démarche permet d’obtenir des informations personnalisées et sécurisées, prenant en compte la situation médicale, le profil et l’âge de chaque individu.

Quelle posologie choisir ?

L’huile essentielle d’aneth est utilisée de diverses manières en fonction de ses propriétés et des besoins spécifiques.

Pour l’application cutanée et le massage, il est essentiel de diluer l’huile essentielle d’aneth à 20 % dans une huile végétale pour éviter l’irritation cutanée. Cette préparation peut être massée sur des zones ciblées telles que l’abdomen, le foie, le dos ou les reins. Dans des cas particuliers :

  • Pour la bronchite, on recommande de masser le dos et les plantes des pieds avec l’huile diluée.
  • En cas d’otite, appliquez une goutte derrière chaque oreille, sans pénétrer dans l’oreille.
  • Pour une toux grasse, massez le dos avec l’huile diluée.
  • En cas de nausées, une trace d’huile peut s’appliquer dans la bouche.
  • Pour les douleurs rénales, massez la zone des reins après dilution et consultation médicale préalable.
  • En cas d’insuffisance hépatique, massez la zone du foie avec l’huile diluée.
  • Pour les troubles digestifs, on conseille un massage de l’abdomen avec l’huile diluée.

On peut utiliser l’huile essentielle d’aneth par voie orale, surtout pour faciliter la digestion, mais toujours sous la supervision d’un spécialiste afin d’éviter les risques de néphrotoxicité.

Pour la diffusion, plusieurs méthodes s’adaptent bien à l’huile essentielle d’aneth :

  • La diffusion par nébulisation est très efficace, bien que coûteuse et parfois bruyante.
  • La diffusion à ultrasons (brumisation) est moins puissante mais convient pour des espaces fermés.
  • La diffusion par chaleur douce nécessite de verser quelques gouttes d’huile dans le réceptacle du diffuseur, et est idéale pour une petite pièce close.

En résumé, l’huile essentielle d’aneth offre une variété d’applications, aussi bien pour des besoins de santé que de bien-être, avec une attention particulière à la méthode d’utilisation et à la dilution adéquate.

L’huile essentielle d’Aneth requiert-elle des précautions d’emploi ?

L’huile essentielle d’aneth, dermocaustique, nécessite une dilution avant toute application sur la peau. Destinée exclusivement aux adultes, elle peut provoquer une sévère irritation des yeux lors d’une exposition olfactive. Il convient de l’utiliser uniquement pour des applications cutanées. On déconseille de la diffuser, de l’inhaler, ou de l’ajouter dans l’eau du bain.

Pendant la grossesse et l’allaitement, l’utilisation de cette huile est contre-indiquée en raison de son effet abortif. Une prudence est de mise chez les personnes atteintes de maladies auto-immunes, épilepsie, les personnes âgées ou souffrant de Parkinson, ainsi que chez les personnes neurosensibles. Elle est également contre-indiquée en cas d’antécédents de convulsions ou d’épilepsie.

L’huile essentielle d’aneth est une inductrice du cytochrome P450 (CYP 2B1 et CYP 2C), nécessitant une consultation auprès d’un pharmacien. Le limonène, un de ses composants, est métabolisé par les enzymes CYP2C9 et CYP2C19. Il est important d’éviter toute association avec la cortisone pour prévenir des interactions médicamenteuses.

L’histoire de cette plante médicinale

L’aneth, probablement originaire du Proche-Orient, s’est d’abord répandu au Caucase et en Égypte. Les anciens Égyptiens l’ont documenté dans le papyrus Ebers (1500 ans av. J.-C.). Le papyrus magique de Leyde, rédigé en grec, le nomme « semence d’Hermès ». Des figures telles que Hippocrate, Dioscoride et Galien ont relaté l’aneth, prouvant son arrivée en Europe bien avant notre ère.

Les Grecs anciens utilisaient l’aneth, associé au fenouil et à la racine de verveine, pour lutter contre la stérilité féminine. Pline et Virgile, dans la Rome antique, mentionnent également l’aneth. Au Moyen-Âge, l’école de Salerne et Sainte Hildegarde l’utilisaient comme remède. L’école de Salerne vantait l’aneth pour « chasser les vents et amoindrir les humeurs ». Sainte Hildegarde le recommandait pour les saignements de nez et d’autres maux.

Matthiole note que l’aneth était omniprésent dans les jardins de son époque, figurant parmi les ingrédients des thériaques. Ses graines, associées à la camomille, le mélilot et la matricaire, formaient le quatuor des plantes carminatives des apothicaires. Bien que l’aneth ait été longtemps limité à l’Europe du Sud, il a finalement conquis les régions nordiques. Apprécié par les Romains pour son odeur anisée, il était présent dans les recettes d’Apicius et la pitance des gladiateurs.

Au Moyen Âge, une branche d’aneth servait de talisman contre la sorcellerie. Cité dans les textes sanskrits et le Nouveau Testament, on connait l’aneth depuis longtemps en Palestine. L’huile essentielle d’aneth appartient aux quatre semences carminatives. on l’utilise depuis le XVe siècle. Dioscoride recommandait l’aneth pour stimuler le lait des nourrices, tandis qu’Avicenne soulignait ses propriétés pour expulser les vents.

Au XIIe siècle, Sainte Hildegarde le prescrivait contre les saignements de nez, et au XIXe siècle, Cazin le comparait au fenouil pour ses bienfaits digestifs. Fournier, au XXe siècle, mentionne son utilisation contre le hoquet.

Sources bibliographiques médicales et essais cliniques

  • Takahashi N, Yao L, Kim M, Sasako H, Aoyagi M, Shono J, Tsuge N, Goto T, Kawada T. Dill seed extract improves abnormalities in lipid metabolism through peroxisome proliferator-activated receptor-α (PPAR-α) activation in diabetic obese mice. Mol Nutr Food Res. 2013
  • Yasdanparast R, Alavi M. Antihyperlipidaemic and anti-hypercholesterolaemic effects of Anethum graveolens leaves after the removal of furocoumarins. Cytobios. 2001
  • Kazemi M. Phenolic profile, antioxidant capacity and anti-inflammatory activity of Anethum graveolens L. essential oil. Nat Prod Res. 2014
  • Orhan I, Kartal M, Kan Y, Sener B. Activity of essential oils and individual components against acetyl- and butyrylcholinesterase. Z Naturforsch C. 2008
  • Franchomme P., Jollois R., Penoël D., L’Aromathérapie exactement, éd. Roger Jollois, 2001
  • Fleurentin J., Du bon usage de l’aromathérapie, éd. Ouest-France, 2018

2 réflexions au sujet de “L’histoire de l’huile essentielle d’Aneth, racontée par une Naturopathe”

  1. Bonjour, toujours aussi intéressant et bien documenté, vos articles sont en outre didactiques tout en restant accessibles aux néophytes que nous sommes.
    Continuez Clémentine, surtout n’arrêtez pas….
    Naturopathement vôtre

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